mercredi 28 février 2024

La poisse

À la base je voulais écrire un article sur le chat en bas de ma rue, celui pour lequel j'ai contacté l'association de la ville, que je devais amener chez le véto parce qu'il éternue (potipoussin) et qui n'était pas là le jour dit (eeeeeh oui, les humains avaient pris des dispositions pour lui mais…) et que je voudrais essayer d'adopter pendant les vacances, la semaine prochaine, voir s'il se sent bien chez moi. C'est toute une difficulté dans le dedans de moi, parce que je n'ai pas d'extérieur dans l'appartement, donc j'hésite, je tournicote, je me dis le pauvre potichat s'il veut sortir, je me dis s'il n'est pas bien chez moi, je m'entraîne à travailler à laisser les portes ouvertes, à me désangoisser de ça, à pouvoir rester concentrée même quand une porte est ouverte, pour que le chat puisse aller partout quand il veut (je me suis dit OK c'est pas différent de quand t'es dans un studio et que t'as pas d'espaces bien séparés, et d'autres trucs), je me renseigne sur internet, je me prépare, je monte des plans : je veux qu'il me suive jusqu'à l'appart, pas le faire entrer dans une boîte de transport, parce que je me dis que comme ça j'aurais peut-être moins l'impression d'un alien entré chez moi ; j'en ai parlé à la dame de la médiation animale, à la psy… Pour plein de gens adopter un chat est super simple, et moi je me dis il ne va pas m'aimer, ou il va m'aimer juste parce que je le nourris, ou comment je sais qu'il m'aime bien moi ou juste parce que je fais des papouilles dans la rue et que un autre humain ce serait pareil ? Je voulais parler de tout ça, en long, en large, et en travers. Mais en fait, j'ai eu une nouvelle, alors je vais parler de ça, plutôt (heureusement que je vois la psy demain, vraiment ce rendez-vous tombe parfaitement bien).

Je ne vais pas au Louvre.
Ce n'est pas que j'ai raté l'entretien. C'est qu'il n'y aura pas d'entretien.
La gentille madame m'a dit qu'elle avait demandé au DHR un budget pour l'apprentissage et qu'elle avait eu un refus ferme et définitif, donc pas la peine que je vienne. Heureusement que j'ai pris les billets tôt et qu'ils étaient remboursables sans frais. C'est toujours ça de gagné.

Ça m'saoule.

Pourquoi rien ne peut jamais être simple ? Plein de gens qui se réorientent trouvent leur formation, la suivent, et la réussissent, et trouvent un travail. Voilà. Aussi simple que ça. Moi, je tente Transition Pro, mais je ne suis pas éligible. Je contacte un DUT, mais j'ai déjà un Master et c'est un problème. J'envoie plusieurs CV à des musées, et ils ne recrutent pas en alternance. Et quand, enfin, j'ai la chance d'intéresser quelqu'un, qu'on me rappelle en quelques jours pour me dire oui, eh bien en fait ça ne marche quand même pas. Rien ne fonctionne jamais simplement. Que ce soit trouver une formation, me réorienter, l'administration ; c'que vous voulez ! Rien ne fonctionne jamais simplement. Même pour mon problème de voiture, il a fallu faire des pérégrinations de ci de là, parce que le premier garage ne savait pas, et il reste encore de l'eau qui ne pourra partir que cet été, et donc j'ai encore des moisissures. Pour mon problème de matelas, pareil. Rien n'est jamais simple, il y a toujours une étape après celle déjà passée. Je prends sur moi de prendre rendez-vous pour l'écho pour mon ventre, et ça ne suffit pas, faut une IRM derrière. Ça me saoule. Je voudrais bien quelque chose de simple au moins une fois, juste UNE putain de fois.

J'avais reçu un appel sans message sur la boîte vocale, je crois que c'était elle, mais j'ai rappelé entre midi et deux et je pense qu'elle était en pause. Heureusement que je ne l'ai pas eu au téléphone, en fait, parce que j'aurais pleuré, et j'étais encore en direct à l'antenne : la reprise après la pause musicale aurait été très compliquée… J'ai répondu au mail de la dame en lui disant que j'aurais aimé travailler avec elle, parce que je l'ai bien aimée quand je l'ai eu au téléphone, c'est vrai ; je crois qu'elle est comme moi : elle parle en même temps qu'elle réfléchit.

Bon. Le problème c'est que lundi mon chef a dit au chef du dessus que je réfléchissais à partir. Heureusement que je lui avais dit d'être prudent en attente de la réponse du Louvre. Parce que là… C'est vraiment la merde. Je vais faire d'autres candidatures, beaucoup plein, même dans des musées qui ne m'intéressent a priori pas tant que ça. Je vais contacter Paris Musées, et puis surtout ben… je vais répondre aux offres qui me seront envoyées par les administrateurs de la fac, même si ça n'a rien à voir avec les musées. La dame du musée de la Marine m'a dit qu'elle avait transféré aux RH mais je leur avais déjà envoyé, sans réponse, donc c'est mort de ce côté. Donc maintenant je m'en fous de où j'atterris, il me faut juste une entreprise et merde. Après, je me casse en Bretagne. Et je prends des cours de théâtre, je me paye une formation de doublage, et j'essaye de faire des voix de dessins animés. J'adorerais faire ça. (Oui, je cherche vraiment à me reconvertir dans les musées en sachant que derrière je veux encore faire autre chose.)

J'en ai marre. Je suis triste mais je suis en colère aussi, parce que rien n'est jamais simple, y a toujours des étapes supplémentaires, jamais d'autoroutes, alors que plein d'autres gens ont des autoroutes : diplôme, premier entretien d'embauche, premier poste qui leur plaît, et point. Ce n'est pas juste. Moi, que ce soit dans le professionnel, dans le personnel, dans le médical, rien n'est jamais simple, rien ne se fait jamais dans l'ordre, sans accroc. Je dois avoir un problème, ou la poisse. La vie c'est de la merde. Et comme j'écris cet article à la place d'écrire une histoire comme je voulais, je vais finir encore plus frustrée, parce que je suis trop fatiguée pour enchaîner derrière, je vois des étoiles. Je suis trop conne.