mercredi 29 juillet 2020

Journal d'écriture, mois 5

Source – Joyce McCown
Ça avance tout doucement et en même temps pas tellement plus que le mois dernier. À la mi-juillet, je n'ai pas pu écrire pendant trois jours de suite en raison de mon travail, ce qui a fait que j'ai eu un peu de mal à reprendre ensuite. Je doute beaucoup sur mon scénario et en même temps je doute sur mon doute. Est-ce que je doute parce que je sens que ce n'est pas assez bon, ou est-ce que je doute parce que j'ai peur que ça ne soit pas assez bon ? La nuance est d'importance... Donc, dans le doute du doute, j'essaye de ne pas accorder trop d'importance à mon doute. Au moins, je ne doute pas encore que ça soit la bonne technique ! x) Je n'ai donc pas écrit tous les jours ce mois-ci, aussi parce que j'ai toujours des problèmes de sommeil et donc du mal à me lever tôt pour écrire avant de travailler et qu'ensuite, même si je n'ai pas vraiment grand-chose à faire (c'est le moins qu'un puisse dire) j'ai du mal à me mettre dedans. Je dirais que ma pratique est assez en dents de scie. Mais j'ai été contente d'écrire deux fois pendant plus d'une heure et demie, dont une fois plus de trois mille mots, ça fait quand même plaisir d'être performante en terme de quantité même si ce n'est pas le but premier ça permet de redonner confiance (c'est très bête, nous sommes bien d'accord).

D'ailleurs, puisque nous en sommes aux considérations de chiffres, j'ai dépassé ce mois-ci la barre des cent mille mots (c'était quand que j'annonçais mes cinquante mille ?), ce qui fait quand même plaisir parce que c'est un stade souvent mentionné par les écrivains en herbe. Mais ça fait aussi un peu peur parce que je n'ai pas vraiment dépassé le milieu quand je me fie à ma frise chronologique (depuis combien de temps est-ce que je vous dis que je suis à la moitié ?!), du coup je commence à me dire que si je dois en écrire encore cent mille, ça va être un calvaire à relire. Même sans ça, ça va être un calvaire à relire. Interminable. Écrire va plus vite que relire. Surtout que je suis une relectrice terriblement lente. Cent soixante-six pages actuellement, quand je vois ça, que je les mets en tout petit sur mon écran, ça fait un peu peur. Mais il faudra bien en passer par-là de toute façon. Et puisque je suis lancée dans les chiffres, je cumule cent treize heures de travail – auxquelles il faut enlever à peu près quatre heures du jour où j'ai malencontreusement oublié de fermer mon document et que je ne m'en suis rendue compte qu'à la mi-journée...

J'avais dit la dernière fois que je pensais possible de finir le premier jet en août. Euh... comment ? À moins d'écrire trois mille mots par jour (ce qui est loin d'être le cas) je ne vois pas trop comment c'est possible... Sauf que si je travaille à la rentrée, ça risque d'être un peu plus compliqué d'écrire. Donc j'aimerais vraiment terminer dans le mois qui vient. D'un autre côté, je privilégie toujours la qualité à la quantité (ce qui fait que je ne participerais jamais au Nano ni à un quelconque camp Nano), donc écrire des tartines pas top juste pour me dire que j'ai fini ne m'intéresse pas. Je pense que ça arrivera juste à me dégoûter de mon travail une fois que je serais en phase de relecture. Et comme j'ai déjà peur de la qualité du truc, il vaut mieux ne pas tenter le Diable.

D'ailleurs, c'est assez drôle parce que, si je reprends les notes que j'ai faites en prévision de cet article, j'ai à la fois dit que je pensais pouvoir faire un bon premier roman, et à la fois que je n'aimais pas tournure qu'avait prise l'histoire, ce qui est parfaitement contradictoire. Du coup, je relis ça et je me dis juste que le jour où je l'ai écrit je devais vraiment être de très mauvaise humeur, parce que là tout de suite maintenant, quand je repense à la tonalité générale du truc, ça me plaît quand même pas trop mal même si ça m'a pas mal échappé par rapport à ce que je pensais faire au début.

Je voulais un truc un peu mystérieux, je ne sais pas comment dire... un peu calme et en même temps où on sente un peu la tension. Or, ce n'est pas du tout ce qu'il se passe et j'ai même l'impression que certaines séquences détonnent totalement par rapport au reste. J'ai aussi toujours un problème avec mon personnage principal qui se fait bouffer par les autres et auquel j'essaye de redonner un peu corps (c'est pas le tout, mais le gugusse il a un deuil à faire, m'voyez, du coup s'il se fait trop bouffer par les autres cette problématique-là a tendance à disparaître) et en même temps quand je lui redonne du champ j'ai l'impression que c'est parfaitement artificiel. En deux mots : au secours !

D'une manière générale sur l'écriture – mais évidemment ça se vérifie dans la progression de ce roman – je trouve que je manque beaucoup de vocabulaire par rapport aux auteurs du XIXème siècle. Donc, je veux vraiment en avoir plus parce que je trouve ça pas top pas top. D'un autre côté, je préfère manquer de vocabulaire que manquer d'idées. Parce que même si on peut apprendre à avoir des idées c'est beaucoup plus long que d'apprendre des mots nouveaux.

Pendant les trois jours où je n'ai pas pu avancer sur le roman, j'ai quand même écrit une nouvelle, sur un petit carnet, pour un appel à textes sur le thème du chiffre neuf. Elle a plus la tronche d'un contre encastré que d'une nouvelle, mais bon... je l'ai recopiée à l'ordinateur et elle attend déjà depuis quinze jours que je la reprenne. Je laisse reposer un peu. D'autant que je sais que j'ai beaucoup de travail de correction dessus, sur la méthode narrative que j'ai choisie, et peut-être aussi un changement de temps à faire (je déteste ça, ça prend un temps fou !). Je ne sais pas si ce texte sera sélectionné (après tout, ce n'est même pas une nouvelle, donc il ne correspond pas à la demande de l'appel à texte) mais ça m'a quand même fait plaisir de finir un texte pour un appel parce que... ben, je crois bien que c'est la première fois. Enfin, la première fois que j'ai une histoire avec un début, un milieu, et une fin, qui se tient vraiment.

D'un autre côté, je m'en fiche. Je ne cherche pas à être sélectionnée, je cherche à avoir un retour sur mon style, mes idées et la manière de les mettre en œuvre. La première fois que j'ai envoyé un texte à un appel à texte ils m'avaient fait un retour commenté et m'avaient dit que, vraiment, "brillait d'un éclat lumineux" (je caricature à peine, malheureusement xD) c'était trop (on a bien compris que ça brille, bordel !). Du coup, j'ai vraiment fait attention aux redoublements de ce genre ensuite. C'est ce que je cherche ; un avis sur comment j'écris et des conseils pour améliorer les choses en prévision de la relecture de mon roman. Je ne sais pas trop ce que ça donnera car ce texte que j'ai écrit est assez différent dans la forme de mon roman (j'ai écrit à la première personne, ce que je ne fais jamais). On verra bien...

J'ai aussi repris la lecture. J'ai eu une période de lecture importante il y a quelques mois puis ensuite c'est retombé comme un soufflet, surtout parce que, sans que je sache la raison, rien ne m'intéresse vraiment. À part quelques mangas, aucun roman, aucune série, aucun recueil de contes, ni même mes National Geographic magazine, ne me vendent du rêve. Mais en même temps j'avais envie de lire, vraiment envie de lire. Donc je me suis dit que j'allais essayer de prendre un bouquin d'Histoire et de voir si ça prend. Et ça a pris, donc je lis. Je vous dis ça parce que j'ai constaté que lire m'a aidé à avoir plus d'idées, même si je n'ai pas plagié le passé de la France. Ça m'a aidé à mieux cerner les enjeux autour de mes personnages, etc. Ce qui est un bon point !

Donc, tout ça avance, tranquillement mais sûrement.

Et de votre côté ? Vos projets avancent-ils bien ?

vendredi 10 juillet 2020

Tout plaquer pour élever des ânes

Source – Afonso Morais
Plus ça va, plus je me demande à quoi sert tout ça. Les voitures, internet, construire des parcs d'attractions... Je regarde les gens dans la rue se presser pour faire quelque chose, aller quelque part, alors que, dans quelques années, il ne restera rien de ça. Ils se dépêchent pour rien : rien de tout ça n'a une utilité, dans le fond. Je me suis même demandée pourquoi la Vie était venue sur la planète Terre. Je veux dire : est-ce que c'est comme une mauvaise herbe qui s'est mise là parce qu'elle en avait l'opportunité, ou est-ce que la Terre a besoin de la Vie pour son équilibre ?

Je ne sais pas si c'est une déprime passagère ou une profonde et lancinante lassitude, mais plus ça va et plus je me dis que j'ai bien envie d'aller me reclure du monde. Je regarde avec envie ces vieux monastères juchés sur un piton rocheux, en me disant que là, je serais bien tranquille, loin de toute cette agitation inutile et vaine qui nous entoure. Je crois que je suis lasse. Lasse de chercher à avoir un métier, lasse de courir, et qu'une vie monotone tout en haut d'un piton rocheux me conviendrait bien. C'est assez étrange, d'ailleurs, quand on y pense, parce que j'ai aussi un côté ambitieux qui fait que je me demande si je serais compétente si j'étais ministre, et que ça serait bien si je pouvais devenir une écrivain célèbre et reconnue, et la meilleure des préparateurs mentaux. Et pourtant, plus ça va, et plus je me dis que rien de tout ça ne sert à quelque chose et que j'aimerais bien m'enterrer dans un petit village de trois cents habitants et y vivre une existence paisible.

Dans mon article sur les métiers que je n'exercerai jamais, j'avais parlé je crois de ce doux fantasme d'élever des ânes de randonnée dans la Creuse. Mais en fait, c'est bien davantage un rêve qu'un fantasme. En Dordogne, plutôt que dans la Creuse ; une grande ferme avec des ânes de randonnée ; des randonnées théâtralisées et contées ; des maisons d'hôtes pour le reste de l'année ; des partenariats avec les écoles pour faire venir des enfants en mode "ferme pédagogique" ; des paysages magnifiques ; juste ce qu'il faut de vie sociale pour ne pas dépérir ; et des ânes, des chiens, des chats. Et c'est tout. Un coin tranquille pour écrire mes romans et les soumettre aux crocs acérés des maisons d'éditions. Et c'est tout. Un peu d'internet, parce qu'on ne fait rien sans internet, et que les réseaux sociaux c'est bien pour faire venir des gens faire des rando. Et des randos, des contes, et des ânes. Et c'est tout.

Du coup, happée par ce paisible rêve, je suis allée voir sur SOS Villages. Eh bien voyez-vous, il y a une ferme, dans le Puy-de-Dôme (pas vraiment la Dordogne) : des terres à louer et un cheptel de vaches à viande à acheter. Autant dire que je garde les vaches pour ma ferme pédagogique mais qu'elles ne verront jamais les néons clignotants des abattoirs lugubres et vivront bien vingt ans dans leur champ à se faire caresser le nez par des marmots curieux. Il ne manque plus que des ânes et quelques travaux. Oh, bien sûr, je ne suis pas stupide, je sais qu'il manque aussi toutes les démarches administratives pour avoir le droit d'exercer, tout le matériel pour monter les ânes – que je prendrais parmi des associations les ayant sauvés de propriétaires maltraitants et défaillants – ; et surtout, l'argent. Allez demander de l'argent à une banque pour un projet un peu fou quand vous avez vingt-quatre ans. J'ai intérêt de bien le monter, mon projet déjanté, mon doux rêve fantasmé.

Je me sens sur la brèche, comme prête à sauter le pas pour mieux échapper au poids des villes, de l'anxiété, de ma propre ambition qui me mène vers des scenarii idiots. Faut dire aussi que j'étais à la crémaillère d'une amie qui a acheté sa maison à crédit et la rénove. Belle maison, beau jardin, tout est grand et un instant je me suis demandée ce que je pourrais bien faire de tout cet espace, à sa place – mais les idées viennent vite ! Je n'étais pas jalouse, je suis envieuse. Je veux une grande maison, un terrain, et des ânes à n'en plus pouvoir les compter. Des ânes frisés, comme j'en ai vus passer à la télé.

Dans le fond, ça aussi serait un peu vain, il n'en resterait pas plus de traces que les courses dans les artères bondées et malodorantes du métro parisien, mais j'ai comme cette impression confuse que plus la vie est simple et plus elle a du sens. C'est comme une fuite. Une fuite pour se reconnecter et arrêter de courir.

Je ne sais pas si je vais sauter le pas. C'est que j'ai un plan bien rôdé, savez-vous, pour devenir préparateur mental. Je me suis même renseignée sur mes chances que mes candidatures soient acceptées en Diplôme Universitaire. Mais plutôt que d'économiser pour ça, cette envie me titille de dépenser mon argent pour apprendre à conter et me rendre à ma banque avec mon projet bien ficelé.

D'ailleurs, ça a même un nom, ce que je veux faire. Ça s'appelle ânier. S'il y a un nom, alors c'est que c'est possible, pas vrai ?

Je trouve mon article un peu déprimant x)
Mais quand même...

Je veux des ânes, et un cheptel de vaches à viande qui ne verront jamais la lueur terne du néon d'un abattoir sordide.