jeudi 21 février 2019

Histoires oubliées

Source – Patrick Janicek 
Il y a quelques mois, à la faveur d'un meuble que l'on vidait, j'ai dégoté deux livres. Un recueil de contes, que je n'ai pas encore lus ; et un roman. Deux vieux livres publiés dans les années 1950, abîmés, surtout pour le roman, que les aléas de la vie dans une école primaire avait tâché de peinture bleue, se trouvait avec quelques pages détachées sur le bas, une reliure en mauvais état et des tâches de moisissures. Il sentait le vieux papier et la poussière. D'ailleurs, quand on tourne les pages, on finit par avoir les doigts sales, et il est suffisamment disloqué pour que l'on doive le lire assis en tailleur afin de bien le soutenir. L'autre était en meilleur état, mais aux pages tout aussi jaunes. Des livres suffisamment vieux pour ne pas posséder de résumé sur la quatrième de couverture. J'ai donc tapé le nom du roman dans un moteur de recherche, et quelle ne fut pas ma surprise de constater qu'il n'était plus publié !...

Enfin.
Ce n'est pas tout à fait vrai. Il en existe une version, publiée si je me souviens bien dans une maison d'édition outre-Manche (mais en français). Et en cherchant, je viens de découvrir qu'une édition est sortie en Mai 2017, après que j'aie trouvé ce livre. En tout cas, ça m'avait surprise, que ce livre ne soit pas publié. Bien que ça n'aurait pas dû. C'est le cycle même de l'Histoire du livre depuis le commencement et les fameux palimpsestes. Des choix sont faits par les éditeurs et certains livres ne sont plus jamais publiés. Même s'ils sont écrits par des membres de l'Académie Française. Même s'ils ont obtenu le prix Goncourt. Et pourtant, ce roman que j'ai trouvé est absolument super, avec des sous-histoires que je voudrais raconter lorsque je serai conteuse (parce que j'escompte bien devenir conteuse).

Alors, à partir de là, je me suis dis que je voulais lire d'autres livres rares. D'autres livres qui ne sont plus publiés. D'autres de ces livres qui, même s'ils le sont, ne le sont pas suffisamment pour ressortir dans une cherche internet. De ces livres qu'on ne trouve pas dans tous les rayons classiques de toutes les librairies (donc exit les Victor Hugo et autres Gustave Flaubert). Aujourd'hui, par exemple, j'ai acheté pour la première fois un livre ancien (je préfère les trouver par hasard, le sentiment n'en est que plus délicieux d'avoir mis la main sur un trésor, mais ça n'arrive pas tous les quatre matins). Je suis un peu longue à la détente, ou alors je suis patiente, je ne sais pas...

Une première recherche sur mon téléphone, avec seulement le titre et l'auteur, ne m'a ressorti que des pages de vente de livres anciens. Chouette ! je me dis, le livre n'est plus publié aujourd'hui. Pas de chance, une recherche avec l'auteur sur le site de la Fnac m'apprend qu'Hachette et la BNF l'ont republié en Octobre 2018, comme ils ont publié en Mai 2017 ma trouvaille. C'est un peu déçue que je suis rentrée chez moi. Je me suis fait doubler par la BNF... (enfin, c'est ce que dit la Fnac, parce qu'il n'apparaît pas sur le site de l'éditeur... (faut vite que je me dépêche de le lire avant qu'il sorte alors ! :P))

Bon, ceci dit, la BNF a plus de ressources que moi pour republier notre patrimoine littéraire ! Et puis, je n'ai toujours pas mis la main sur un résumé, et se lancer dans un vieux livre sans en connaître l'histoire, c'est assez charmant, comme expérience – alors que je ne le fais jamais dans une librairie classique (on n'est plus à une contradiction près). J'ai choisi ce livre pour le titre, qui m'a tapé dans l’œil : Champi-Tortu, de Gaston Chérau – vous connaissez ? Bref. Les vieux livres sont terriblement cool et j'aime beaucoup l'idée de mettre la main sur des choses que l'on ne peut plus trouver aujourd'hui (même si la BNF a décidé de me mettre des bâtons dans les roues !).

vendredi 15 février 2019

Respirer

Source – Paul Nicklen
Depuis quelques temps je me suis rendue compte que je respire mal. Je respire depuis longtemps par le ventre, tout comme il faut, mais ça fait plusieurs mois que je me sens comme.. bloquée. Je m'en suis rendue compte parce que, de temps en temps, on a besoin de reparamétrer sa respiration. Vous savez, ces moments où vous prenez une grande respiration, ou deux, et que ça permet de respirer mieux après ? Un jour, j'ai fait ça, comme on le fait souvent sans le faire exprès, sauf que ma respiration n'est pas repartie comme elle devait repartir, et c'est à partir de là que j'ai pris conscience que je m'étais mise à respirer mal. Et le pire, c'est que c'est peut-être de ma faute...

Hier, j'ai eu ma première séance de sophrologie avec une amie qui est en formation (je suis donc l'une de ses honorées cobayes (parce qu'elle est trop cool)). À la fin de la séance, il faut parler de ce que l'on a ressenti, pensé (même si l'on n'est pas censé penser), pour qu'elle puisse évaluer un peu notre point de départ et, par la suite, notre point d'arrivée. Alors je lui ai dis que je sentais que je respirais mal, que je contractais mes abdos et que du coup je n'inspirais plus, que ça me perturbait, me restait dans la tête, et qu'à chaque fois qu'elle disait "respiration naturelle" je me rendais compte que je respirais affreusement mal – et elle l'a dit souvent !

Je lui ai dit que ça durait depuis un moment et que je m'en étais rendue compte en écoutant une hypnose sur YouTube parce que le monsieur dit au début de prendre deux grandes inspirations. Elle m'a dit que ce n'était pas top parce que ce sont des hypnoses très générales et que donc elles mettaient plus de temps à faire effet et que du coup peut-être que quelque chose était remonté. Puis en plus y a souvent beaucoup d'erreurs dans les hypnoses sur internet (même si celui-là m'avait l'air assez sérieux). Du coup, maintenant, je me retrouve avec un problème de respiration sur les bras, comme si je n'en avais pas déjà assez.

C'est une sensation très étrange. Comme si, quand j'inspire, mes poumons étaient déjà à moitié remplis, et que, du coup, je ne pouvais pas inspirer vraiment à fond. Ou comme si, quand j'expire, ils ne se vidaient pas entièrement. Il arrive aussi que je reste "bloquée" en position d'expiration : j'inspire, mais mon ventre reste rentré. Mais la plupart du temps ma respiration est vraiment irrégulière, comme un peu laborieuse, et je n'arrive pas à la "recaler". Je m'en rends compte surtout le soir, quand je dois m'endormir, et ça me perturbe beaucoup. Je n'ai jamais eu de problèmes avec ma respiration. Quand j'ai appris qu'il fallait respirer avec le bas des poumons et pas le haut, je n'ai eu aucun mal à passer à la respiration abdominale et à y rester.

Sauf que c'est embêtant parce que la respiration c'est un peu la base. En sophrologie, en méditation, en aïkido, aussi, où on expire sur le geste (par exemple sur la coupe avec le bokken)... Et puis la respiration est liée à notre état émotionnel, aussi. Quand on est en colère on ne respire pas de la même manière que quand on est calme, et quand on est malade, ou que l'on a mal, on ne respire pas de la même manière non plus. J'ai voulu aller voir ce que les psychologues avaient écrit sur la respiration, mais l'article qui m'a paru le plus intéressant n'était pas disponible en entier... Mais toujours est-il que la respiration, c'est la base. De la parole, du discours, du chant, du yoga, et de tout un tas de trucs. À commencer par la vie. Donc je suis très embêtée...

samedi 9 février 2019

Je n'écris plus

Source – David Negstad
Enfin, ce n'est pas tout à fait vrai. J'écris. J'écris toujours des histoires. Mais pas des choses sérieuses. Enfin si, je les écris sérieusement, mais je ne les écris pas pour autre chose que pour moi. Hrm. Pour que tout ça soit clair, il faut que je vous explique les deux catégories principales de ce que j'écris habituellement.

La première est composée des textes que je considère comme des romans, et que je traite comme des romans. Je pars en connaissant la fin, et je commence en me servant d'un proverbe ou d'une citation pour fil-rouge. Je le prends avec plus de sérieux quand j'écris, je fais plus attention à mon style (ou à mon semblant de style). Dans la deuxième, je mets ce que j'appelle les "juste comme ça". Un juste-comme-ça c'est une histoire souvent interminable (quatre-vingt-page et on n'est pas à la moitié, quand mon dernier "roman" s'il mérite de nom avait cent dix pages), où je sais où je vais sans vraiment avoir une fin, où je ne fais pas plus attention que ça à la manière dont j'écris, je ne réfléchis pas trop, il y a souvent beaucoup de dialogues et une histoire d'amour (je n'en mets pas dans les romans parce que je considère qu'en mette une pour en mettre une ça sert à que dalle). Ce sont plus des choses que j'écris pour traiter des sentiments, des émotions, les extérioriser. C'est bourré de clichés et encore plus attendu que quand je suis sur un roman. J'en ai plusieurs à la fois, à des points d'avancée variable, qui pour certains ne bougeront plus avant un long moment, alors que les romans je n'en ai toujours qu'un à la fois. Il arrive aussi que j'arrête un juste-comme-ça parce que je voudrais en faire un roman, parce que finalement y a un vrai truc à faire avec.

Ces derniers temps, il n'y a plus que ça que j'écris. Par manque de temps (ou plutôt parce que je décide de ne pas en prendre), parce que je n'ai pas la place dans mon esprit de penser à ça (ma recherche de stage me prends tellement d'énergie, et je suis tellement dans une période d'auto-flagellation que si je me mets à écrire un roman je ne m'en sortirais jamais), et parce que je me suis rendue compte que je n'écrivais pas avec le bon état d'esprit.

Il y a quelques mois j'ai fini un roman. Je l'ai envoyé à deux amies, qui ne l'ont pas fini, et à ma tante qui, si elle ne l'a pas dit comme ça parce qu'elle est gentille, l'a trouvé mauvais (pour ne pas dire nul). Le fait est qu'il n'y avait pas vraiment d'histoire dans le sens où ça n'évoluait pas trop, mais je suis quand même contente d'avoir réussi à finir quelque chose. Je crois que dans ce récit rien n'était vraiment clair pour l'esprit d'un lecteur extérieur, et que c'est ça le vrai problème.

Depuis que j'ai commencé à écrire je ne cesse de répéter que je n'écris que pour moi, que l'écriture c'est un processus de moi à moi. Je l'ai même écrit sur des forums. Sauf que, au final, je pense que ça ne peut pas fonctionner. Je pense que l'on n'écrit pas de la même manière, on ne s'exprime pas de la même manière, quand on s'exprime à soi et quand on s'exprime aux autres. Quand je me parle toute seule réfléchir (ce que je fais de moins en moins, peut-être parce que j'ai peur que mes colloc' m'entendent, et ça manque), je ne me parle pas pareil que quand je vous écris à vous. Je ne peux pas demander à des lecteurs extérieurs de comprendre ce que j'écris si, à la base, j'ai écrit pour moi.

Et donc, le temps que ça se décante (genre, ça va se faire tout seul), je n'écris plus. Je crois que je dois aussi mieux gérer ce que je mets de moi et ce que je garde pour moi dans un roman. Je dois être plus mesurée. Je peux me servir d'un juste-comme-ça comme d'un psy, pour mettre en scène mes émotions, mes peurs, mes aspirations, mes désirs, mais ça ne peut pas fonctionner avec un roman. Alors je vais bousculer la liste que j'avais (oui, parce qu'en plus, dans ma tête, je savais ce que j'allais écrire plus de trois histoires à l'avance) et je me relancerai sur un récit avec de vraies péripéties, et dont je sais qu'il est bon. D'ailleurs, d'une manière générale, je sais que mes idées sont bonnes mais, comme pour tout le reste, c'est la réalisation qui pêche, et ça me frustre beaucoup, car j'ai l'impression que je pourrais faire plus, faire mieux. C'est l'histoire de ma vie. Mais je ne peux m'en prendre qu'à moi. Je sais que je ne fais pas assez d'efforts, que dans ce cas je ne lis pas assez, je n'écris pas assez... J'ai toujours eu des facilités, donc je ne sais pas travailler. Je dois faire le deuil d'un vieux rêve : le talent. Le talent n'existe pas. Il va falloir que je l'intègre.

Il y a quelques temps j'avais répondu à un appel à textes. La dame m'avait fait beaucoup de critiques (que je n'ai pas trouvées toutes justes) et avait fini par me dire d'aller sur des forums pour progresser. Je suis sur un forum, je squatte la partie Écritoire, sur toutes les questions d'écriture. Mais je réponds, juste. Et je ne veux pas publier mes textes, des chapitres, sur ce forum. Parce que je ne veux pas que les avis influent sur le processus d'écriture. Sur la correction, pourquoi pas. Mais pas sur la gestation.

Et puis je ne pense pas avoir besoin de ça pour progresser. Je sais qu'en disant ça j'ai l'air de la fille un peu méprisante ou imbue d'elle-même, qui pense que les autres sont tous des cons et qu'elle vaut mieux que ça, mais ce n'est pas ce que je veux dire. Ce que je veux dire c'est que, les conseils et tout c'est super, mais ce sont des trucs techniques. Comme le fait de ne pas doubler les termes (par exemple une pierre qui brille d'un éclat jaune, m'voyez ?). Mais ça n'améliore pas intrinsèquement le texte, ce sont des détails. En cours, nous avons rencontré le journaliste Ramsès Kéfi il y a peu. Il nous disait qu'il prenait tous les sujets, parce que ça pouvait lui permettre de progresser, parce que ce sont les sujets qui font progresser. S'il voit par exemple une scène qu'il n'a jamais décrite, et qu'il doit réfléchir à comment la décrire, ça va le faire progresser.

Je pense que, pour l'écriture de fiction, c'est un peu pareil. Il faut prendre du recul sur ce que l'on fait et se laisser aussi guider par son histoire. Si je dois décrire une émotion que je n'ai jamais décrite, je vais forcément apprendre de nouveaux mots, de nouveaux verbes, qui vont me permettre de mieux la décrire, ou même le simple fait de devoir la décrire avec des mots que j'ai. Et puis lire, pour voir comment les autres font, et apprendre des trucs. Par exemple, il y a quelques mois, j'ai lu Jules Verne et j'ai compris la différence entre "!..." et "...!". On dirait un détail dont je parle un peu plus haut, mais en fait, c'est beaucoup plus que ça, ça change tout au ton du personnage ! Il y a aussi quelque chose que j'adorerais savoir faire parce que je trouve ça juste génial. Vous savez, quand un auteur décrit un personnage en une ou deux phrases, sans presque rien dire du physique, mais que vous le voyez bien dans votre tête, physiquement, parce qu'une description de son caractère suffit. Je vous mettrais bien un exemple, mais je n'ai pas le livre sous la main... Mais ça, ce n'est pas sur des forums que l'on apprend à le faire, c'est en essayant.

Pour progresser, j'ai besoin de changer d'état d'esprit, j'ai besoin d'ouvrir un document Word en me disant qu'à la fin ça finira dans les mains d'autres personnes d'un éditeur, que j'écris pour partager et pas pour moi, que je n'enverrais pas à un éditeur par défaut, pour tester, juste pour voir, au cas où. Et quand j'en serai là, je vous pondrai un chef-d'oeuvre ! :) (on y croit !)