mercredi 28 décembre 2022

Mes 5 derniers livres lus (n°11)

Les vacances m'ont permis de lire les deux derniers gros pavés de cet article ! Je n'ai pas lu autant que je le voudrais, la faute au Serpent Ouroboros sur lequel j'ai été plus lente, et je ne vais pas relire sérieusement avant un moment, puisque je vais être occupée avec les corrections de mon roman et que j'ai toujours du mal à lire des romans dans ces périodes ; je ne peux lire que des mangas, des magazines ou des truc scientifiques type catalogue d'expo.

L'avis du deuxième livre n'est pas très précis car je l'ai écrit un assez long moment après lecture ; je les ai lu dans ma période de déprime du mois d'août et je n'avais à ce moment-là aucune envie, ni motivation, ni intérêt ni quoi que ce soit d'écrire la chronique…


Le Château des nuages – Diana Wynne Jones

Loin du pays d’Ingarie, dans le sultanat du Rajpout, un jeune marchand se plaît à rêver à une vie différente. Il s’imagine ainsi fils de roi, promis depuis sa naissance à une belle princesse, bien loin de sa vie miséreuse et de son père ingrat, bien loin de son petit étal de tapis. Lorsqu’un beau jour, un étranger lui vend un tapis volant. La vie d’Abdallah prend un tournant pour le moins inattendu. Les péripéties s’enchaînent et le destin de notre héros semble soudain lié à celui de la superbe princesse Fleur-dans-la-Nuit. Pour la retrouver, il part pour une incroyable odyssée, semée de Djinns légendaires, de sorciers, de prophéties anciennes… et d’un mystérieux château dans les nuages.

Il s'agit de la suite de la Trilogie de Hurle dont le premier tome a inspiré Le Château ambulant d'Hayao Miyazaki.

Je crois que j'ai préféré ce tome-là. Dans mon souvenir, le premier m'avait paru un peu confus, vers la fin surtout, alors que celui-là est plus clair. Les personnages sont bien faits, c'est assez drôle par moments, et on sent la petite touche féministe au passage sur les princesses, à la fin.

J'ai eu un peu de mal à entrer dedans, ça a mieux été à partir de la deuxième moitié ! J'ai beaucoup aimé suivre les personnages, c'est une lecture toute mignonne, sans prise de tête, bien construite, bien menée, et j'ai donc enchaîné sur le tome 3 direct ! Tome 3 qui prend de nouveaux personnages dans un nouveau royaume, donc les tomes sont indépendants. On peut choisir de ne pas lire les 2 et 3 ou de commencer par les 2 et 3 (même si ça occasionnera quelques infos divulgâchées vers la fin).


La Maison aux mille détours – Diana Wynne Jones

Charmaine se voit confier la garde de la maison du sorcier royal Guillaume, son grand-oncle. La mission paraît simple et propice à beaucoup de temps libre. Elle ignore toutefois que la bâtisse n’est pas ordinaire ! Celle-ci est en effet conçue comme un labyrinthe dont chaque porte vous mène à travers le temps et l’espace, vers des lieux différents ! Rejointe par Pierre, un apprenti sorcier pour le moins maladroit, la jeune femme se perd au cœur de la maison aux mille détours et découvre qu’un gigantesque complot s’organise dans le royaume. Le temps est désormais compté. Charmaine et ses amis n’auront que peu de temps pour percer les mystères auxquels ils font face, et empêcher le pire de se produire…

J'ai apprécié ma lecture même si je dois m'avouer déçue qu'il n'y ait pas eu d'histoire d'amour au contraire des deux tomes précédents (c'est mon côté fleur bleue, que voulez-vous !). On y retrouve le ton et l'univers un peu frappé de Diana Wynne Jones. En revanche, la quatrième de couverture est mal écrite. Elle laisse penser à une histoire très vive, avec une bande d'amis qui court partout pour sauver le monde dans les méandres du pouvoir… ce n'est pas vraiment le cas, car ce n'est pas le style de Diana Wynne Jones. Du coup, j'étais assez surprise d'un rythme finalement assez tranquille. Mais c'est une histoire agréable à lire ! Je n'ai par contre pas compris l'histoire du chien. J'étais censée faire, sans doute "ooooh" et "aaaah" et ça ne s'est pas produit, et je n'avais pas l'énergie d'aller chercher dans le texte les indices.


Le Sang des parangons – Pierre Grimbert

Le monde des hommes est en train de s’effondrer. Et toutes les prières, tous les sacrifices, semblent incapables d’y remédier. L’humanité assiste, impuissante, à son crépuscule. Une dernière chose doit cependant être tentée. Une folie, à la hauteur de cette situation désespérée.
Chaque nation, chaque territoire a ainsi désigné son champion. Certains sont des sages, des savants, ou des dévots. D’autres sont des mercenaires, des aventuriers ou des chevaliers. Il y a même des rois et des reines… Ils ne se connaissent pas, ils ont parfois des intérêts contraires, mais ils ont été réunis pour former le groupe des parangons. Une escouade d’exception dont la mission représente la dernière chance de survie de leurs peuples respectifs.
Ensemble, ils vont devoir pénétrer la montagne sacrée, siège du palais souterrain des dieux. Et s’ils parviennent jusqu’aux éternels, malgré les dangers légendaires que renferme cet endroit, ils devront les convaincre de sauver leur monde agonisant. En les suppliant… ou bien en les défiant, si nécessaire.
Mais combien de parangons verront leur sang versé sur le chemin, pour permettre aux autres de continuer ?
En restera-t-il un seul, qui pourra prouver que l’humanité mérite vraiment d’être sauvée ?

Je n'ai pas aimé la fin.

Les personnages sont excellents, comme toujours chez Pierre Grimbert ; c'est sa grande force. Le rythme est bon aussi. Mais je n'ai pas aimé la fin. Le "combat final" m'a paru précipité, un peu tombé de nulle part, trop rapide, comme s'il s'était dit "vite-vite, je n'ai droit qu'à cinquante pages pour tout conclure, ça ne va jamais tenir !". J'ai été perturbée par le rythme de la scène du combat, ou chaque personnage attaque chacun son tour ; j'ai trouvé que ça ralentissait le rythme (les rares personnes qui ont lu mes romans ont droit, à cette remarque, de se gausser :P). Dans un manga, ça passe bien parce que l'on voit bien que chaque intervention de chaque personnage est rapide ; mais dans un roman, le temps de lecture c'est du temps de combat, et du coup même en sachant que c'était hyper rapide, j'avais cette impression de lenteur. C'est difficile d'en dire davantage sans trop en révéler, mais ce qui arrive à certains personnages qui comprennent des choses sur eux m'a paru aussi trop dit, balancé comme ça, je ne sais pas… Je ne pense pas que ce qui m'ait posé problème soit le scénario de cette scène finale : je crois que c'est vraiment le rythme, trop rapide, trop brusque.

J'ai été mal à l'aise de la révélation de ce qu'il y a sous la montagne, aussi. J'avais cette impression de plongée en science-fiction. Si c'était le but de Pierre Grimbert eh bien, ma foi, c'est réussi !

La première partie de l'épilogue a un côté très cynique, rattrapé par la seconde, que j'ai bien aimée, où des couples sont confirmés même si dans tout le roman les rapprochements étaient discrets (je mentionne ça parce que… je suis fleur bleue, que voulez-vous !).

J'ai été rassurée de la fin, aussi, d'ailleurs. Pierre Grimbert avait dit dans une interview que vu le nombre de héros au début (quarante-et-un !) ils n'allaient pas tous survivre. Je prévoyais déjà de perdre les chouchous et de me vider de mes larmes sur les pages mais fort heureusement les morts sont plutôt parmi les héros secondaires. Je dois dire que ça m'a plutôt plu/rassurée/convenu parce que je n'imaginais pas Pierre Grmbert, qui de ce que j'ai lu de lui a plutôt tendance à faire des histoires avec de l'espoir et du bonheur, tuer les préférés ou du moins ceux sur l'épaule desquels on s'était penchés le plus.

J'ai lu une critique sur Babelio qui mettait la foi comme l'un des messages de ce livre : je trouve au contraire que la religion en prend pour son grade, notamment dans la conversation de la mage avec Kamandra, et à la fin, avec Jio, quand ils sont presque arrivés au palais des dieux.

J'ai aimé toute ma lecture jusqu'à la fin, le rythme du voyage dans la montagne et des péripéties est bon, le choix des points de vue aussi. J'ai par contre regretté que certaines blessures soient oubliées. Je pense notamment à Dukern, blessé à l'aine, qui parvient quand même à marcher et à grimper alors que son baudrier aurait dû le gêner. Même dans le chapitre sous son point de vue où il dit se sentir fatigué, il n'est pas fait mention de la gêne, voire la douleur, que cette blessure peut causer. J'ai trouvé dommage que la fatigue et la douleur, ce que les corps enduraient, ne soit pas un peu davantage traité. C'est dit plein de fois, qu'ils mangent et dorment peu, mais on ne le voit pas vraiment (sauf si on considère que ne jamais les voir endormis montre justement qu'ils ne dorment pas :P), voire on fait disparaître une blessure comme celle de Dukern. C'est dommage.

J'ai trouvé intéressant de plonger de nouveaux dans des galeries, un peu comme dans Gonelore et le Cycle de Ji ; même si c'était différent, je trouve intéressant de voir Pierre Grimbert explorer encore ce rapport aux souterrains et à la pierre, particulièrement à la magie de la pierre, ce qu'il avait déjà fait dans le Cycle de Ji. On pourrait tourner ça négativement comme un auteur qui ne se renouvelle pas mais personnellement je ne trouve pas du tout ! C'est davantage comme une variation, en fin de compte.

Donc pour résumer j'ai aimé toute ma lecture, j'ai dévoré les pages, et j'ai achoppé sur la fin, sur la révélation et le combat final. J'ai quand même hâte de lire le roman suivant (vivement 21 lames tome 2 !) !


Les Cités des Anciens, tomes 1 et 2 – Robin Hobb

Les dragons. Leur puissance. Leur magnificence. Leur clairvoyance. Mais leur fragilité, aussi. À celles et ceux qui sauront les comprendre et les protéger s'ouvrira la route des mythiques Cités des Anciens. Les autres, ennemis ou simples imprudents, le paieront de leur vie.

J'ai mis beaucoup de temps à entrer dans le premier tome en partie à cause du résumé : je ne voyais pas vraiment où on allait, où Robin Hobb voulait nous emmener et quelle était l'intrigue. Ensuite, quand ça a commencé à se dessiner un peu mieux, c'était plus facile. Cependant, même si c'est une bonne histoire avec de bons personnages, des choses m'ont un peu dérangées.

Je commence à connaître Robin Hobb, donc certains développements des personnages se devinent dès leur première rencontre avec d'autres personnages. Ensuite, il y a Grig, le chat du bateau, qui apparaît tellement rarement que quand il était signalé je me disais parfois : "ah oui ! c'est vrai, il y avait un chat !" (et il disparaît tout à fait à la seconde intégrale, sans explication aucune) alors que sur une petite gabare, sans le voir toutes les deux lignes, il devrait être plus visible (où fait-il ses besoins ? qui s'en occupe ? n'a-t-il pas peur des dragons ? n'est-il pas dérangé quand la population du bateau augmente du simple au double ?). Comme Robin Hobb a beaucoup de personnages, la majorité n'est pas vraiment développée et ils sont souvent seulement appelés "les gardiens", sans identité à eux. Le fait qu'il y ait une liste de personnages au début du roman n'était déjà pas vraiment bon signe. Je trouve ça un peu dommage, même si c'est vrai qu'il faut aussi faire des choix et qu'il vaut mieux réduire les points de vue que les multiplier vu que la multiplication peut diluer l'évolution des personnages, mais j'aurais quand même aimé en savoir plus sur certains d'entre eux, au moins de manière indirecte.

Du coup, le développement de certains personnages va aussi trop vite, comme la relation entre Sédric et Carson. Le développement d'Alise est assez prévisible, surtout que Robin Hobb a déjà développé un personnage abusif dans Les Aventuriers de la mer ; j'étais un peu embêtée qu'elle ait refait la même chose ici. Passer des messages féministes et humanistes c'est super, mais je trouvais ça un peu redondant, même si c'est toujours bien fait.

Quand ils arrivent enfin à leur objectif, Alise évoque les possibilités de ces nouvelles terres arables mais, quelques pages plus tard, Leftrin lui en parle comme si elle ne se rendait pas compte alors qu'elle vient juste d'en parler. Je mets ça sur le compte des quelques incohérences qui surviennent parfois – comme dans les autres tomes du Cycle des Anciens, d'ailleurs. Par exemple, Kanaï, qui au contraire ce que pensent les personnages, n'est évidemment pas mort, raconte que l'eau les a emporté, lui et sa dragonne, dans le sens du courant : en aval, donc. Là où ils sont arrivés, ils se sont rapprochés de leur but, puisqu'ils ont trouvé des terres arables. Mais le but, quand ils y arrivent tous à la fin, est en amont. Kanaï et Gringalette n'ont pas pu se rapprocher du but en se laissant emporter par la rivière vers là d'où ils venaient. Même en empruntant un effluent. C'est illogique.

En fin de compte, je ne sais pas trop quoi penser de ce premier intégral. J'ai aimé ma lecture mais elle est émaillée de petites contrariétés. J'ai pourtant acheté les intégraux suivant avec mes chèques de Noël. J'ai bien envie de savoir comment tout ça se finit, surtout que je me souviens avoir vu passer la publication Instagram d'une lectrice qui évoquait une sorte de grande révélation qui remet pas mal de choses comprises jusque-là en cause et demanderait de relire tous les tomes à la recherche des indices.

Je ne sais pas trop quoi penser non plus de la seconde intégrale. Là encore, c'est émaillé d'incohérences : Hest de Reddine qui commencent par se vouvoyer puis se tutoient, le dragon Crache qui devient dragonne le temps de quelques lignes, la provenance de la robe cadeau de Leftrin à Alise, la couleur des griffes de Thymara qui passe de noire à cobalt à noire, Ephron Vestrit désigné comme le père de Malta alors que c'était son grand-père… C'est agaçant. Je devrais avoir l'habitude, pourtant, comme il y en a dans tous les tomes de ce cycle, mais j'ai trouvé qu'il y en avait particulièrement beaucoup dans ce tome-là.

J'en ajouterais peut-être même deux. La première, plus de l'ordre de l'invraisemblance – je divulgâche un peu, faudra pas m'en vouloir, surtout que ma divulgâcherie est assez logique du point de vue des besoins de Robin Hobb pour le scénario – ; Hest meurt mangé par un dragon qu'il a provoqué. Il tombe dans l'eau du bain, la jambe arrachée. Ensuite, personne ne sait où est diantre passé Hest. Il m'a fallu un jour ou deux pour me faire la réflexion que, même si les dragons se mettent du sang partout en mangeant, il n'y en a sans doute jamais assez pour colorer le bassin. Or, dans un être humain, il y en a beaucoup, des litres et des litres, et Robin Hobb dit que le sang colore l'eau. Personne ne s'est donc demandé pourquoi il y avait tout ce sang dans l'eau ? Mouais. Même si le bassin est assez grand pour contenir un dragon, l'eau devrait quand même avoir une coloration suspecte. La deuxième, c'est que Tintaglia, à un certain moment, s'inquiète pour ses œufs dans son ventre, dont elle attend la maturité pour pouvoir les pondre et donner naissance à la première génération de dragons. Un peu plus tard, Kalo dit que les œufs de l'année prochaine seront les siens : il faut donc un an pour que les œufs fécondés par un mâle soient prêts à pondre. Or, il y a plusieurs années que Tintaglia a rencontré Glasfeu, puisqu'elle s'accouple avec lui pour la première fois aux alentours du moment où le Fou, dans la partie précédente, apprend qu'Althéa est enceinte, et que quand on rencontre de nouveau Althéa dans cette partie, le petit marche et parle un peu mais surtout que la narration rappelle que l'on n'a plus de nouvelles de la dragonne depuis plusieurs années qu'elles a rencontré son compagnon. Du coup, les premiers œufs auraient déjà dû être pondu et l'avenir des dragons assuré. Ça aussi, il m'a fallu quelques temps pour le réaliser; sur le moment c'est passé crème.

Donc, si j'ai pas calculé n'importe comment, ça ajoute un problème. Je trouve ça dommage car jusque-là Robin Hobb maîtrise sa chronologie, tout s'emboîte entre Terrilville et les Six-Duchés, les histoires des uns et des autres… Alors vous allez me dire, dans une fresque aussi grandiose et immense, on s'en fiche de savoir quand une dragonne pond ses œufs. Ben oui, on pourrait, mais c'est quand même dommage que ça vienne érafler la carrosserie, surtout que ça s'ajoute aux autres petits problèmes, et du coup ça me laisse encore plus un sentiment mitigé à la lecture. J'espère vraiment que la fin du cycle vaut le coup, sinon je vais finir par me demander pourquoi Robin Hobb est autant porté aux nues. Je trouve ça dommage aussi que personne parmi ses relecteurs (elle doit bien en avoir, quand même !) ou éditeurs ne lui aient fait la remarque. J'imagine que, hors intégrales, il a fallu plusieurs années pour écrire tout ça, donc je comprends parfaitement qu'il puisse y avoir des accrocs et c'est extraordinaire qu'il n'y en ait pas plus, sans doute, mais je me demande quand même pourquoi personne n'a eu la vigilance de lui faire ces remarques, surtout que souvent les petites incohérences sont des détails faciles à corriger – et que perso ça fait plusieurs années que j'ai lu les intégrales précédentes et je m'en souviens suffisamment bien pour remarquer certaines choses, donc c'est que c'est possible même sans tout relire avant.

Certaines choses, comme la survie de Tintaglia, qui débarque pile au moment où on trouve de quoi la soigner, est au compte des choses prévisibles.

En fait, je suis en train de me dire que c'est le problème avec les longues sagas, quand les tomes du milieu dépendent de la suite. Tu peux avoir les meilleurs personnages du monde, les plus précis, les mieux construits (et ceux de Robin Hobb sont comme ça – avec un bémol sur les viols qui suscitent tous la même chose chez les victimes, la même ligne d'évolution) : tu es quand même bloqué par ce dont tu as besoin pour la suite. Je crois que Les Cités des Anciens sont des tomes de transition : on place des changements dans le monde comme tremplin à la suite. Et on se retrouve bloqués. Pour conclure l'arc d'Alise et Sédric et leur affranchissement à Hest, on est obligé de faire disparaître Hest, puisqu'il est impossible de raisonner Hest et que, sans sa mort, l'intrigue ne serait pas achevée à la fin du roman. Et pour que Malta et Reyn restent en vie et servent pour la suite, on est obligé de sauver Tintaglia. J'étais surprise quand elle a failli mourir, je me suis dit : "tiens, Robin Hobb a décidé de nous surprendre" et en fait non, parce qu'elle est bloquée (et en vrai je comprends aussi de ne pas faire mourir les personnages, je n'aime pas faire souffrir les miens xP) pour la suite, si elle fait ça.

J'ai aussi trouvé moins de finesse à Robin Hobb dans ses messages féministes. Elle y va de front et devient redondante : encore des viols et violences psychologiques, sur plusieurs personnages (j'en ai compté 6 sur 15 femmes sur tout le cycle auxquelles il faut ajouter Selden et Sédric – et toujours avec le même développement, alors qu'il y a autant de niveau de résilience que de victimes donc l'argument du "oui mais dans la vraie vie" ne tient pas) ; encore de méchants manipulateurs abusifs ; encore des garçons qui ne pensent pas aux conséquences des grossesses des filles. Je la trouvais plus fine avant, moins directe, et surtout moins à raconter toujours la même chose. Ça m'a aussi agacée ; peut-être que je n'étais simplement pas de bonne humeur pour lire des triangles amoureux tendus et des leçons rabâchées.

Je n'ai pourtant pas cessé ma lecture, je voulais savoir le fin-mot de l'histoire et j'en garde le souvenir d'une lecture agréable une fois que les passages agaçants sont passés. C'est pour ça que je ne sais pas quoi penser de cette lecture. Les personnages sont bien fait, c'est assez bien construit. Mais, là encore, je ne sais pas si c'est parce que je commence à connaître Robin Hobb ou parce que les ficelles étaient grosses, mais certaines choses sont prévisibles, certains développements, comme la relation d'Hennessie et Tillamon – quoi que Robin Hobb ait eu la bonne idée de le traiter rapidement sans en faire des caisses. Donc, je ne sais pas.

J'ai aussi trouvé que la multiplicité des personnages n'était pas forcément bien gérée (même si je sais que c'est un exercice très difficile) : beaucoup de dragons ne sont jamais nommés si bien qu'on les oublie, et de même, sur peut-être les deux tiers du livre voire un peu plus, Alum n'apparaît jamais. Il est dans les conversations et les pensées de Skelli et Leftrin, par exemple, mais il n'est jamais nommé quand on est avec les gardiens : on ne le voit jamais participer à la chasse, au soin des dragons, etc. C'est un peu corrigé ensuite, mais c'est dommage qu'il disparaisse ainsi, car du coup on l'oublie et il ne paraît pas avoir d'existence réelle.

Je crois que je m'attendais à être complètement retournée, comme toujours jusque-là avec les personnages de Robin Hobb, mais ça ne s'est pas produit, et les défauts m'ont encore plus sauté au visage par contraste. Je n'ai pas détesté ma lecture, je l'ai même appréciée et je n'en garde pas un mauvais souvenir, mais je ne l'ai pas non plus adorée, parce qu'elle s'est émaillée de contrariétés. J'ai suivi l'histoire de manière un peu détachée, je crois, par rapport à d'habitude.


Le Serpent Ouroboros – E. R. Eddison

Sur la lointaine Mercure, les trompettes de la guerre viennent de retentir, les tambours de chanter le fracas des armes et les épées de se parer de leur manteau de pourpre. L’honneur des Démons a été foulé aux pieds par le roi de Sorcerie, et pour laver l’affront, le seigneur Juss et ses alliés s’apprêtent à livrer un combat épique. Leur périple les conduira à travers forêts et déserts, mers et marais, au coeur des fabuleuses contrées de la terre du milieu, depuis leur majestueuse Démonie aux mille montagnes jusqu’aux plus hautes cimes enneigées de la terre.

C'est Lessingham, Terrien comme vous et moi, qui emprunte un charriot magique et se retrouve spectateur de l'histoire sur Mercure, mais je me demande si ce n'est pas juste un prétexte à Eddison pour faire entrer le lecteur dans son univers en un temps où la fantasy naissait à peine, parce qu'en fin de compte Lessingham disparaît tout à fait et on ne le retrouve même pas dans un épilogue.

C'est un roman étrange. Toute la première partie traite moins de la guerre en elle-même que des aventures de Brandoch Daha et Juss pour retrouver Goldry enlevé par une espèce de diable invoqué par le roi de Sorcerie. Puis, ensuite, il est question de guerre, de mouvement des armées, mais dans un style vif et rapide, et pas en interminables expositions, donc je ne me suis pas du tout ennuyée. C'est un roman entre le rêve, le conte, le roman médiéval, le récit d'aventure à la Jules Verne avec ses quêtes impossibles taillées pour des héros extraordinaires, dans un univers imaginaire qui en fait un roman de fantasy.

J'ai aimé mais j'ai quand même repéré des contrariétés. À un certain moment, une prise d'armes a lieu dans une salle de banquet : il n'est jamais fait mention des dames présentes : si elles crient, se cachent sous les tables, prennent un coup perdu… elles disparaissent purement et simplement. Quand ils sont en Lutinie, Crachefeu se trouve séparé de Juss et de Brandoch Daha, puis on ne parle plus de lui, puisqu'on suit les deux autres, et on le retrouve à faire face à la guerre, en Démonie, de l'autre côté de la mer, sans qu'on sache comment il est arrivé là puisqu'aux dernières nouvelles il était pourchassé. Et enfin, quand Juss et sa bande de preux reviennent au lac de Ravary pour, cette fois, libérer Goldry de sa prison, je n'ai pas trop compris comment ils étaient arrivés là, parce que la première fois ils ont dû traverser des montagnes abruptes, donc l'ont-il refait, ou y avait-il un autre chemin ? On parle d'un bateau qui attend, mais ensuite on dit qu'ils repartent (à pied) pour retourner à leurs bateaux beaucoup plus loin. Puis même avant ça, on les avait laissé bien des chapitres plus tôt à ce même endroit avec un probable départ en Démonie pour chercher un œuf, mais finalement quand on les retrouve en Démonie, l'œuf est récupéré comme ça, comme sur un coup de tête, comme s'il avait été précédemment oublié. Cette suite de séquences-là, surtout le retour au lac, m'a paru un peu bancale.

J'ai beaucoup aimé la place des femmes dans ce livre, à la fois "à leur place de femmes" et à la fois indépendantes, qui se déjouent des hommes, parfois.

J'ai bien aimé, et j'ai bien aimé la fin, assez étrange aussi, qui colle pas mal à l'histoire et donne un autre relief au titre, j'ai trouvé.

J'ai aimé le style aussi, avec ses phrases parfois construites bizarrement et ses métaphores. Je pense que ça ne plaira pas à tout le monde ; il faut aimer les plumes marquées, les styles personnels.


J'enchaîne sur des mangas, je pense, pour chasser de ma tête ce style bizarre et reparamétrer un peu mon cerveau avant de corriger mon propre roman :)

Que lisez-vous en ce moment ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire