vendredi 10 janvier 2020

Théâtral

Source – H.B. Kang
Parfois, j'ai l'impression de ne pas être moi-même. Ce qui suppose que l'on puisse ne pas être ce que l'on est. Mais je pense que vous m'avez comprise, même sans entrer dans des considérations philosophiques. En fait, des fois, j'endosse un rôle de gamine. Je parle comme un enfant et je me fais passer pour plus bête que je ne suis. Je ne sais pas quand j'ai commencé. Mais toujours est-il que parfois ça m'échappe. Je prends cet air sans vraiment le vouloir, comme un réflexe pour me cacher, et je me dis en mon fort intérieur que là, précisément à cet instant-M, je n'en ai pas besoin et que "tu es trop conne, ma pauvre fille" (ou cette bienveillance que j'ai à mon égard !). En même temps, il y a aussi mon manque de spontanéité.

J'ai déjà beaucoup parlé ici de contrôle, à tel point que je devrais peut-être mettre sur le blog le petit widget de recherche dans me blog, comme ça vous pourrez vous amuser à voir le nombre d'articles dans lequel j'en ai parlé x) Je contrôle – ou plutôt j'entretiens l'illusion que je contrôle – mes pensées, mes gestes... et jusqu'aux situations. Des fois, j'imagine dans ma tête la manière dont je vais annoncer, dire, apprendre, quelque chose à quelqu'un, j'extrapole sa réponse, et de là j'imagine toute la situation. Je la met en scène, je la théâtralise. Bien sûr, on fait sans doute tous un peu ça, ne serait-ce que pour ne pas blesser, ne pas braquer, et faire passer en douceur ce qu'on a à dire. Mais ça, ça s'appelle de la diplomatie. Je pense que ce que je fais moi dépasse ce cadre, j'ai l'impression régulièrement que ça ressemble bien plus à de la manipulation. Et j'ai surtout l'impression que je m'enferme là-dedans. J'ai l'habitude de me dire que je suis en représentation. Et donc, si je joue un rôle, je ne suis pas moi-même.

Évidemment, tout ça suppose que l'on puisse être tout à fait soi-même, sachant que l'on ne se comporte pas pareil avec ses amis, sa famille, ses collègues, son patron (mention spéciale à un camarade drôle comme tout et avec de la répartie qui s'était mis sur la retenue alors que sa patronne d'alternance se trouvait dans le coin), ses parents, les gens qu'on apprécie et ceux dont on se passerait bien... Mais je pense que tout ça c'est être un peu soi-même – mon camarade est aussi capable d'être sérieux, la preuve ! Alors on pourrait dire que le rôle que je prends, c'est aussi moi. Une coquille un peu caricaturale que je revêts par-dessus la coque de noix. Mais moi, j'ai l'impression que ce rôle m'empêche d'être moi. On n'est jamais vraiment tout à fait soi-même et à la fois toujours un peu. Du coup, à force de toujours prévoir ce que je vais dire à l'avance, de me mettre en scène, quand je parle sérieusement, sans faire la gamine et en spontanéité, il m'arrive régulièrement de chercher le mot que je veux, d'employer faussement un synonyme ; j'admire les gens qui ont de la répartie. Mais il y a aussi des situations où on est entièrement soi-même, parce que les barrières ne tiennent plus.

Par exemple, je pense que le sport révèle les gens. Ceux qui pressent les autres, qui rejettent la faute sur eux ; les gens positifs, persévérants, drôles ; les gens qui veulent gagner à tout prix, quitte à mettre une boîte au volley face à une équipe constituée de grands débutants qui ne pourront pas arrêter la balle et alors que le cours vise surtout à nous améliorer et non à battre les autres ; les gens un peu imbus, qui ne supportent pas de s'être retrouvés avec ou contre des personnes vraiment moins bonnes qu'eux, ou au contraire ceux qui prendront sur eux parce que la prof a voulu tenter un truc en composant les équipes ; les gens qui donnent des conseils aux autres et les encouragent ; les gens dépités de ne pas réussir ; ceux qui viennent avec leurs problèmes de coordination (moi, donc...) ; les gens qui veulent progresser, et ceux qui sont là un peu comme ça, juste pour être avec leurs amis, et qui ne font pas vraiment d'efforts.

Je pense que les personnes de l'aïkido et du volley (moins de l'escalade parce que j'y vais depuis moins longtemps, je m'y rends moins souvent, et surtout, du fait que je n'accroche pas avec les personnes, je suis beaucoup plus sur la retenue, puis j'ai peur de faire des conneries (ils doivent donc s'être rendue compte que je suis une flipette, comme mon moniteur de conduite, d'ailleurs)) me connaissent plus que les autres. Les situations sont plus riches et variées au volley, alors je dirais que les personnes du volley me connaissent encore mieux. Mon manque de confiance en moi ressort, ma peur de mal faire, le fait que j'encourage les autres sans être capable de me traiter de la même manière, la frustration quand je ne parviens pas à faire ce que je veux. Je crois que la phrase que je répète le plus c'est "oui, je sais, j'ai compris la la théorie ; mais dans la pratique c'est pas pareil". Quand je suis perdue parce que j'ai pas compris, à l'aïkido, surtout. Quand j'essaye de bien faire mais que ça fonctionne pas... La persévérance, un peu quand même, sinon je ne me serais pas améliorée à ce point (non, sans blague, je touche les balles, vous savez !).

Je pense que le sport révèle les gens. On ne peut pas mentir quand on fait du sport. Un jour, on rentrait avec les personnes avec qui je joue le plus souvent, et le garçon a dit qu'un jour on lui avait dit qu'il était froid. Lui ? "Froid" ? C'est une plaisanterie ?! Il est enjoué, joyeux, drôle, positif, avec cette facilité à aller vers les autres que j'envie toujours. Qui pourrait le trouver froid, sérieusement ? Alors j'avais répondu que moi on m'avait dit un jour que j'étais hautaine, méprisante. Ils ont été aussi surpris que nous l'avions été à sa déclaration. Comme quoi...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire