lundi 1 mars 2021

Mes 5 derniers livres lus (n°4)

Oui, déjà :P Que voulez-vous, en ce moment mes émotions sont assez instables et j'ai pas mal besoin de m'évader (ou de fuir, ça dépend comment on regarde...). Du coup, j'ai mangé des livres. Du coup, je viens vous en parler ! :) Il y a moins de diversité de genre que la dernière fois, mais des choses tout de même assez différentes, donc j'espère que vous y trouverez tous des points d'intérêt !

Engrenages et sortilèges
– Adrien Tomas

Grise et Cyrus sont deux élèves qui vont à la prestigieuse Académie des Sciences Occultes et Mécaniques de Celumbre. Une bonne nuit, l’apprentie mécanicienne et le jeune mage échappent de justesse à un enlèvement persécutif. Alors qu’ils se détestent entre eux, ils doivent malgré tout fuir ensemble et chercher un refuge dans les Rets, un très sinistre quartier aux mains des voleurs et des assassins. S’ils veulent survivre, les deux adolescents n’ont aucun d’autre choix que de faire alliance…

Je dois dire que quand j'ai refermé le livre il y a quinze jours, j'étais pas mal remontée, je crois d'ailleurs que le petit mot que j'ai laissé sur Babelio était un peu sec. Aujourd'hui, j'ai pris un peu plus de recul et je suis plus mesurée dans mon impression, mais il n'en demeure pas moins que je suis assez... irritée. D'autant qu'Adrien Tomas est un auteur que j'avais bien aimé dans La Geste du Sixième Royaume, donc... c'est d'autant plus frustrant pour moi.

En fait, tout s'est plutôt bien passé pendant les deux premiers tiers du livre. On suit Grise et Cyrus, des personnages bien faits, avec une évolution entre eux peut-être un chouïa trop rapide mais en même temps vue la merde dans laquelle ils sont, ce n'est pas non plus trop choquant. Ils ont leur faiblesses et leurs qualités et sont assez sympa. Mention spéciale à Quint le chat :P Mais déjà dans ces deux premiers tiers, j'ai tiqué à plusieurs reprises. Grise et Cyrus ont dû fuir et sont cachés dans "les Rets", un quartier malfamé où règnent toutes sortes de délinquants et de criminels. Le problème, c'est que le côté "les gens sont tellement opprimés qu'ils deviennent des voleurs pour survivre parce qu'ils n'ont pas le choix" est terriblement... caricatural, et moralisateur dans la mesure où... on ne le voit pas ! On nous le dit, à plusieurs reprises, mais l'autorité méchante, avilissante, et étouffante de l'Empire, on ne la voit pas. Et le fait qu'on ne le voit pas, a créé chez moi une sorte de refus, un peu comme si les personnages divaguaient (j'exagère un peu, mais c'est l'idée).

Ce problème est encore plus flagrant dans le dernier tiers. On mentionne l'impact profond des guerres sur la société mais... rebelotte : on ne voit rien, on doit y croire, hocher la tête, acquiescer, et continuer la lecture. Quel impact ? Quelles blessures, quelles transformations de la société par la guerre ? Et dans ce dernier tiers on se retrouve face à des questions sociales rendues encore plus moralisatrices par le fait que les personnages (à l'exception des héros) sont très caricaturaux. Le méchant un peu psychopathe sur les bords, la reine complètement à l'Ouest, etc. Tout est très... manichéen. Le gentil peuple opprimé contre le méchant Empire, contre le méchant gouvernement oppresseur... Ça, on nous le matraque, on nous parle des impôts, etc. ; on nous le dit mais ce n'est pas montré. C'est le plus gros problème de ce livre.

Parler des inégalités, des régimes totalitaires, de la liberté, des privilèges de certaines classes sociales (parce que Grise et Cyrus font partie des privilégiés et vont donc découvrir la misère du monde) sont des sujets que l'on peut tout à fait aborder dans un roman fantasy, dans un roman Jeunesse, et dans un roman tout court. D'une manière générale, les sujets graves peuvent parfaitement être abordés (et d'ailleurs le dernier livre de cette présentation est concerné et s'en est, pour moi, mieux tiré). Mais ici, c'est trop caricatural, trop manichéen... ça manque de finesse, de subtilité, il manque le fameux "montrez, ne dites pas" ; à tel point que ça en devient moralisateur.

Et le problème c'est que... je ne me plonge pas dans un roman fantasy Jeunesse pour lire une leçon de morale. Je sais qu'il y a des inégalités, je sais que les gouvernements peuvent parfois passer les limites, que toutes ces questions sont hyper importantes, et je pense que la plupart des ados en ont aussi conscience à divers degrés. Me confronter à ces sujets au travers d'un roman fantasy ne me dérange pas. Par contre, quand le thème est traité d'une manière aussi manichéenne, oui, ça me dérange. Parce que j'ouvre un roman pour me détendre, m'évader, et pas pour avoir entre les mains un texte moralisateur...

Je divulgâche un peu à partir de là, pardonnez-moi ! :P

Mais ce n'est pas le seul problème du dernier tiers d'Engrenages et sortilèges. J'ai trouvé la fin... terriblement mauvaise (ou précisons plutôt : mal amenée) (et d'autant plus que les deux premiers tiers sont super !). On se retrouve dans une espèce de procès en place publique, qui a du mal à démarrer parce que des informations qu'on sait déjà sont redonnées. Je n'ai pas compris ce choix scénaristique, en réalité. On a deux premiers tiers avec de l'action, deux héros sympa comme tout, et on termine sur un procès qui conduit à... une Révolution ?

Je veux dire... tout à coup, à la fin d'un chapitre, on nous dit que c'est comme ça que la Révolution a commencé. Ah. Moi, ça ne me dérange pas, qu'on me parle d'une Révolution. Mais du coup c'est le genre de trucs que j'aurais voulu savoir dès le début ; peut-être dans un prologue ou peut-être sur une quatrième de couverture, pour que je lise un récit en mode "comment on en est arrivés là" et pas un truc complètement absurde. J'ai eu l'impression que ça tombait comme un cheveu sur la soupe.

J'arrête de divulgâcher :)

En fait, sur ce dernier tiers, j'ai eu l'impression de lire la fin d'une autre histoire, comme si Adrien Tomas avait changé d'idée en cours d'écriture. Or, je pense qu'un auteur qui réussi son coup peut faire gober n'importe quoi au lecteur. Absolument n'importe quoi. Mais là, ça ne passe pas, pour moi.

J'ai aussi trouvé que beaucoup (trop) d'informations passaient dans les dialogues et ça m'a parfois paru pas très naturel (surtout dans les premières pages (ce que je peux comprendre étant donné le type de narration, mais qui est quand même parfois un peu lourd)).

C'est d'autant plus dommage que les deux premiers tiers étaient vraiment sympa tout de même, même si j'aurais davantage aimé voir les deux héros mêler leurs capacités plutôt que voir simplement le résultat de leur travail. C'est aussi d'autant plus dommage que la plume est bonne, fluide, avec du vocabulaire ; bref : que le style fonctionne.

Mais pour moi, il y a un vrai problème de traitement des thématiques, et de la fin complètement... sortie de nulle part ! Ça m'a un peu donné l'impression d'une histoire pas aboutie. D'autant qu'à la fin on nous parle du "monde" puis trois paragraphe plus tard du "monde connu". Or, ce concept de "monde connu" n'est pas je pense quelque chose qu'on peut utiliser comme ça, "pour faire genre", mais bien un concept important pour placer notre univers (et d'ailleurs Pierre Grimbert le manie à la perfection dans le Cycle de Ji). Bien sûr, vous pourriez me répondre que c'est anecdotique, et en un sens c'est vrai. Mais en un certain autre sens je trouve que c'est aussi une sorte "d'indice" sur le fait que ce roman a un problème.

Pour autant, Adrien Tomas a sorti il y a peu un autre roman dans le même univers (qui je pense se passe plusieurs années plus tard étant donné les informations données sur la quatrième de couverture), et il est d'ores et déjà dans ma liste de mes prochains achats. Tout simplement parce que j'ai quand même passé un bon moment pendant la majeure partie du premier livre et que je voudrais redonner sa chance à cet auteur. Parce que même si j'ai beaucoup critiqué, il y a quand même des choses sympa.

Les Fourberies de l'amour – Georgette Heyer


Pour rendre service à sa mère criblée de dettes, Evelyn Denvill, dandy désinvolte, accepte de jouer la comédie de l'amour à Cressida Stavely, issue d'une famille fortunée, dans l'espoir de restaurer les finances familiales. Mais le soir où un dîner est donné en son honneur par la famille de sa fiancée, Evelyn disparaît. Son frère jumeau, Christopher, accepte de le remplacer à cette réception. Et comme le hasard fait bien les choses, le jeune homme n'est pas insensible au charme de la ravissante fiancée de son frère…

On ne se moque pas ! :P Oui, j'ai lu une pure romance. C'était ma première de toute ma vie, même si j'aime beaucoup les histoires amoureuses en intrigue secondaire. J'avais besoin de quelque chose de léger, de sympa, de pas prise de tête, et comme je suis tombée dessus dans les rayonnages des livres à vendre d'une bibliothèque pas loin de chez moi et que je l'ai eu pour deux euros, il n'y avait vraiment aucune raison de se priver !

J'ai beaucoup aimé ! Il y a énormément de dialogues (presque que ça, d'ailleurs, et c'est quasiment du théâtre) et presque pas de descriptions psychologiques ou de lieux. Ça demande un petit temps d'adaptation quand on ne s'y attend pas ; mais une fois que l'on a compris le principe, ça coule tout seul !

On suit des personnages un peu frappadingues, quand même, surtout la mère des jumeaux. Elle passe pour une gentille bécasse un peu déconnectée mais pourtant est assez attachante dans son genre (et termine par une petite manipulation gentillette qui démontre qu'elle n'est pas si bête qu'on pourrait le penser :P).

En réalité, on suit moins la vie amoureuse des personnages que la résolution de l'imbroglio dans lequel ils se sont fourrés et de la raison pour laquelle Evelyn a disparu.

Certains dialogues sont franchement drôle ! J'ai passé un super moment absolument comme je l'avais prévu : mignon, léger, pas prise de tête !


Contes pour jeunes filles intrépides : Des quatre coins du monde
– Praline Gay-Para


Après le succès des recueils Contes curieux des quatre coins du monde (Babel n° 818) et Contes très merveilleux des quatre coins du monde (Babel n° 1258), Praline Gay-Para nous offre une savoureuse sélection de récits et légendes du monde entier dont les héros sont des héroïnes : princesses, paysannes ou jeunes filles en fleur, épouses, grands-mères ou enfants, elles brillent par leur ingéniosité, leur indépendance, leur courage, leur audace.

J'avais déjà lu un recueil de cette conteuse et rassembleuse de contes et j'étais bien décidée à en lire d'autres ! Je me suis donc lancée dans celui-ci. Si je n'ai pas toujours vue en quoi les héroïnes brillaient, j'ai bien aimé ces histoires souvent assez surprenantes qui nous amènent sur plusieurs continents. La plume est agréable.

J'ai juste un bémol, en réalité. Sur l'un des contes, provenu du Yémen, la fin a été modifiée. Je trouve que ça se sent étant donné l'origine du conte et le fait que l'histoire s'inscrive dans un contexte religieux fort. Ou alors est-ce parce que le sort des Mille et Une Nuits et que jamais un conte de ce genre ne s'est fini comme ça ? En fait, modifier la fin d'un conte ne me dérange pas en soi, bien au contraire : les contes vivent, ils sont sans cesse modifiés par les conteurs, et le public valide ou pas ces modifications, qui perdurent ou disparaissent au profit d'autres variantes colportées par d'autres conteurs.

La fin créée par Praline Gay-Para est plutôt maline et sympa, et ne pose pas de problème non plus en soi ! Mais, en fait, je trouve qu'elle ne sonne pas très réaliste étant donné la provenance de l'histoire et, éduquée par Les Mille et Une Nuits, j'avais deviné la vraie fin avant de lire le mot de la conteuse dans les annexes. Cependant je reconnais deux choses : premièrement, sans ma lecture précédente je n'aurais sans doute rien remarqué ; deuxièmement : un conte n'a pas à être réaliste dans la mesure où c'est un conte. Mais tout de même, je ne suis pas bien sûre que la fin colle bien à ce type de conte. Même si je comprends, dans le propos de Praline Gay-Para, pourquoi elle l'a modifié !

À part cette seule remarque, rien à signaler ! On a effectivement des héroïnes inventives et débrouillardes, et même certaines qui prennent les armes ! :)


Dame Merveille et autres contes d'Égypte
– Praline Gay-Para


Beautés silencieuses, vizirs félons, nomades rusés ou reines infanticides, toutes les figures des légendes orientales se trouvent réunies dans ces contes cruels, tendres, drôles ou grinçants.
Puisant dans le fonds traditionnel mondial, conformes à la "morphologie du conte", ces textes néanmoins sont spécifiquement égyptiens : ici, les femmes aiment la magie, les pauvres fument du haschisch à la lueur des bougies, les crânes humains tiennent leurs macabres promesses, et les tricheurs signent des pactes avec le diable.
Recueillis par une conteuse, traduits de l’arabe ou adaptés par elle, les contes d’Égypte que voilà ont été mis en bouche : de l’oralité, ils ont gardé la vivacité et la fraîcheur, mais aussi la force.

Ces contes, écrits au présent, sont souvent assez acides et inattendus ! Certains motifs bien connus (du genre de la pantoufle de Cendrillon) sont présents mais utilisés d'une manière surprenante et parfois déroutante !

J'ai beaucoup aimé cette lecture, et je crois même que je l'ai fini en une traite ! J'ai beaucoup aimé les personnages et leurs histoires qui ont parfois le parfum des Mille et Une Nuits ; ce qui n'a rien de vraiment étonnant puisque l'on se trouve dans la même région du monde !


Le Chœur des dragons
, tome 1 : Le Fléau des Rois – Jenn Lyons


Kihrin a grandi dans les quartiers pauvres de la Cité capitale. Voleur et fils de ménestrel élevé dans une maison close, il a été bercé par les fables évoquant des princes disparus et des aventures trépidantes. Lorsqu’il est malgré lui désigné comme le fils perdu d’un seigneur cruel et corrompu, Kihrin se retrouve à la merci des querelles de pouvoir et des ambitions politiques qui animent sa nouvelle famille.
Quasi prisonnier, Kihrin découvre qu’être un prince disparu n’a pas grand-chose à voir avec les histoires des ménestrels. D’ailleurs, il s’avère que celles-ci lui ont bien menti : sur les dragons, les démons, les dieux, les prophéties… et l’idée que le héros gagne toujours à la fin.
Peut-être Kihrin n’est-il pas ce héros, finalement. Car il n’a pas pour destin de sauver le monde… mais de le détruire.

Alors... Comme pour Engrenages et sortilèges, il y a beaucoup de choses à dire et je ne sais même pas par quel bout je vais prendre ce casse-tête... Le mieux serait déjà que je commence par le début : ce livre m'a interpelée en premier de par sa couverture épurée, très différente des autres couvertures de chez Bragelonne. Ensuite, le résumé m'a bien plu. Mais je ne voulais pas série, alors j'ai laissé tomber. Puis finalement... ben finalement j'avais bien envie de tenter l'aventure quand même. Alors je me suis lancée. Puis, si on me promet des dragons, c'est difficile de résister :P

D'abord, il faut signaler l'originalité de la mise en scène. Pendant la majeure partie du livre, il y a une sorte de récit-cadre : Kihrin est prisonnier, Serre est sa gardienne, et elle le fait raconter son histoire pour tromper l'ennui. Mais comme Kihrin ne commence pas à l'endroit qu'elle considère être le vrai début, ils s'échangent des tours de parole, ce qui fait que l'on a deux temporalités en parallèle. Le récit est rapporté par un personnage qui écrit la "retranscription" et fournit donc des compléments avec des notes de bas de page. Au début, quand j'ai vu ces notes, j'ai pris un peu peur, mais finalement ça marche très bien !

Au contraire du roman d'Adrien Tomas, j'ai un peu galéré dans les deux premiers tiers, mais le dernier est dynamique, bien tourné, tout roule !

Plusieurs fois pendant ma lecture je me suis demandée si je n'allais pas lâcher l'affaire. Non pas que ça ne m'intéressait pas ou que la plume est mauvaise, loin de là ! Mais parfois le "montrez, ne dites pas" est assez abscons. Il y a aussi des petites erreurs. Par exemple dans une note de bas de page notre transcripteur dit qu'il est bizarre de lire une description de lui-même. Sauf que lui l'entend, puisqu'il travaille à partir de la réécoute de la conversation... Puis Kihrin commence à vouvoyer son auditoire, alors que dès la première page, dans son dialogue avec Serre, il la tutoie (je ne saurais pas dire si c'est une erreur de l'autrice ou de la traduction). Et puis il y a aussi des coquilles ici et là qui ont tendance à me hérisser le poil. Tout ça mis bout à bout fait que je me suis posée des questions.

Surtout que l'ambiance du début, si on n'est pas dans l'atmosphère gluante de la dark fantasy, n'est quand même pas très loin et, plus que ça, l'appétit sexuel d'un héros qui a entre quinze et seize ans pendant la majeure partie du récit m'a un peu... choquée ? perturbée ? Je veux dire, je veux bien qu'il ait grandi dans un bordel, mais quand même... ceci dit on ne voit rien ! Il n'y a pas de scènes de sexes toutes les deux pages (j'aurais refermé, sinon), c'est davantage suggéré ou rapporté. Mais j'ai quand même été mal à l'aise du fait du jeune âge du personnage. Peut-être est-ce à cause de mon rapport assez compliqué à la sexualité, ou alors parce que c'était, précisément, le but de l'autrice.

D'autant que les thèmes qui sous-tendent le récit tournent autour de la sexualité, l'orientation sexuelle, les violences sexistes et sexuelles, le consentement (par la question sexuelle ou pas, d'ailleurs), et même le détournement de mineurs. Jenn Lyons traite des sujets graves. Et ça marche. Ce n'est pas "trop", ce n'est pas "glauque pour être glauque" : ça sous-tend l'histoire. On comprend les messages que veut faire passer l'autrice (non, je ne confonds pas auteur et narrateur). On les sent d'ailleurs un peu trop parfois. À trois ou quatre reprises, je me suis fait cette réflexion que l'on ne parlait plus de cet univers ou à ces personnages mais que l'on parlait au lecteur humain de la Terre au XXIè siècle. Ça m'a fait tiquer et sortir de ma lecture. Or, s'il y a bien une chose que je déteste c'est d'être sortie de ma lecture. Surtout quand la cause de cette éjection de l'histoire est la lecture elle-même.

Je comprends que ces thèmes soient abordés de manière directe : ils sont des thèmes importants du livre et ils doivent donc être traités sans détour. Je comprends aussi qu'il soit d'autant plus important de traiter ce genre de thématique de manière juste (dans le sens de la justesse) et appropriée pour démontrer que l'on peut écrire une bonne histoire sans répandre la culture du viol. Cependant, quelques discussions entre les personnages y vont trop avec les gros sabots, je pense (surtout la discussion de la fin entre Jabel et Kihrin qui se rapporte au thème de la "princesse en détresse") et du coup on sait que l'on parle ici davantage de nous que de l'univers du roman. C'est peut-être l'objectif de l'autrice, mais je trouve ça dommage de ne pas être un tout petit peu plus subtile, juste histoire de faire passer le message sans sortir le lecteur averti de sa lecture (ou même le lecteur non-averti qui risque de lever les yeux au ciel en mode "oui, c'est bon, on a compris" excédé).

Il est difficile de comparer ce livre avec le roman d'Adrien Tomas parce que celui d'Adrien Tomas est un roman Jeunesse et que donc on n'attend pas le même public, comme on ne peut montrer le même degré de violence, etc. Mais Jenn Lyons démontre que l'on peut traiter les sujets lourds, graves, en montrant plutôt qu'en disant, et sans laisser cette impression de donner la morale (à moins que ça ne soit parce que je me reconnais plus dans le message de ce livre que dans l'autre ? je ne suis pas vraiment une gauchiste dans l'âme... (même si les régimes totalitaires, c'est la merde, on s'entend !)). Je pense que ça vient du fait que les personnages et l'histoire elle-même sont beaucoup plus ambivalents. À part le fait que la violence des femmes est présentée comme une vengeance (justifiée) alors que celle des protagonistes vient juste du fait qu'ils veulent le pouvoir (ceci dit, je suis obligée de me nuancer moi-même : on frôle la dark fantasy, donc c'est normal), les personnages ne sont pas "bons" ou "mauvais". Ils ont leurs parts d'ombres, leurs qualités, leurs traumatismes. La frontière entre le Bien et le Mal est floutée, surtout à la fin du tome. Ce n'est ni manichéen, ni caricatural. C'est le Bien contre le Mal mais pas "les gentils" contre "les méchants". C'est une nuance importante à mes yeux.

J'ai parfois eu un peu de mal avec les histoires dynastiques... je crois bien que j'ai pas tout compris (en même temps, lire jusqu'à 23h-minuit (ce qui est vraiment super tard pour moi) n'a pas vraiment dû aider).

J'ai aussi trouvé que parfois c'était difficile de me représenter les âges des personnages. Par exemple Kihrin est censé avoir seize ans mais est beaucoup, beaucoup plus mature (étant donné son parcours ce n'est pas très étonnant, en même temps). Mais les catégories d'âges de beaucoup d'autres personnages ne sont pas signalées et j'ai trouvé ça difficile, du coup, de me les représenter.

Peut-être que mes réserves et mon avis si mitigé, en fin de compte, alors que c'est au final une lecture que j'ai plutôt appréciée, vient aussi du fait que la communication de Bragelonne autour de ce roman est dithyrambique. Du coup, je me suis attendue à un "effet wahou", je pense (alors qu'il n'y a pas plus subjectif que ça !) ou du moins à un truc extraordinaire. D'un côté, quand j'ai lu qu'il y avait déjà une série télé de prévue, je me suis dit "oula" dans le sens : OK, ça a plu parce que c'est du truc où il y a tout ce qu'il faut : de la trahison, des secrets, de l'action, etc. En fait, pas tant, mais du coup je suis partie un peu sur des œufs, avec quand même cette idée en tête que ça devrait me souffler. Et du coup... ben... face à des coquilles, des trucs parfois pas trop bien menés (des "montrez, ne dites pas" un peu obscures, par exemple), je suis assez mitigée. Alors que peut-être n'aurais-je pas été si sévère sans cette promesse d'extraordinaire qui m'a été faite.

La fin est telle que l'on pourrait s'arrêter là. Ce n'est pas un cliff-hanger qui fait sursauter et crée un avide désir à savoir la suite. Je pense donc en profiter pour effectivement m'arrêter là pour le moment. Pas à cause de l'histoire, de mon malaise face à Kihrin (d'ailleurs, le dernier tiers est purgé des questions sexuelles et l'ambiance est moins glauque, ce qui fait beaucoup de bien) mais simplement parce que je pense que ce n'est pas ce que j'ai besoin de lire actuellement. Je vous en reparlerai mais mes émotions sont assez instables en ce moment et je suis une vraie éponge donc j'ai besoin de choses un peu plus légères (comme Les Fourberies de l'amour mwahahaha !). Le tome 2 est déjà sorti. Je pense que j'attendrais qu'ils sortent tous pour m'y remettre (je crois qu'il s'agit d'une tétralogie déjà quasiment entièrement sortie en VO). D'autant que c'est une histoire de prophétie, etc. et même si c'est bien mené, ce n'est pas ce que j'ai envie de lire en ce moment.

Dans tous les cas, si vous voulez une bonne fantasy (parce que ça reste une bonne fantasy malgré mes quelques remarques) sans risquer de lire des scènes qui s'enlisent dans la culture du viol, vous pouvez y aller ! :)


Voilà !
Et vous ? Que lisez-vous en ce moment ?

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