mercredi 12 janvier 2022

(In)sécurité

Source photo – Blue Bird

Tout à l'heure j'ai posé la voiture chez Mondial Pare-brise : lundi, en allant au boulot, j'ai découvert la vitre arrière droite de ma voiture cassée : ça tenait encore mais on voyait toutes les marbrures (et quand, le soir, j'ai eu la mauvaise idée de fermer un peu fort la portière, des bouts de verre ont sauté… ô joie). Ça me saoule parce que, bien sûr, ma voiture est la seule de la rue. Ça me saoule parce que ça s'ajoute à a mésaventure de la semaine dernière lors de laquelle je me suis retrouvée enfermée à l'extérieur de chez moi et, venant à peine de prendre une chambre d'hôtel, l'agent immobilier m'annonce que, finalement, un serrurier est disponible. Et évidemment ma demande de remboursement de la chambre est toujours à l'étude… et évidemment l'assurance ne prend pas en charge le serrurier (j'ai toujours pas la facture). Ça commence donc à faire beaucoup, ajouté au reste. Mais je crois que dans le fond ce qui m'ennuie vraiment c'est que ça met à mal mon sentiment de sécurité : ou plutôt ça l'empêche de se créer vraiment.

Je vous avais déjà parlé du fait que je me sens en insécurité, intérieure surtout. Du coup, quand je ne suis pas en sécurité à l'extérieur non plus, ça entre en résonnance et ça me fout le bourdon. Le fait que je me retrouve avec une voiture cassée (et qui donc le sera peut-être à nouveau) et des dépenses imprévues au moment où j'avais envie de m'acheter (m'offrir, on pourrait presque dire) des choses sur ma liste depuis longtemps (dont la boîte Morphée pour le sommeil, assez central, comme besoin), ça me trouble aussi. Faut dire que j'aime que les choses se déroulent comme prévu, donc l'imprévu, le changement, c'est déjà la panique à bord. Ajouté aux dégradations matérielles et à l'aspect financier, on a un beau cocktail pour me faire dormir quatre heure la nuit… Surtout que mon cerveau a une tendance naturelle au pessimisme et que, même si j'essaye d'apprendre l'optimisme, il suffit que ça s'accumule pour que la membrane optimiste se dissolve comme si elle n'avait jamais existé. Je sais que c'est beaucoup dans la tête, un jeu de perceptions, mais le savoir n'aide pas forcément toujours à en sortir.

Un membre du forum d'écriture que je fréquente et qui lit mon blog (et donc se reconnaîtra : cooouuucooouu :D), bêta-lit aussi Roman 2, donc a ma vraie identité, donc accès à mes réseaux sociaux, et tout le tintouin. C'est très bizarre mais des fois j'ai ce sentiment que c'est trop, que surtout on ne devrait pas se rencontrer en vrai, que je suis en danger dans… je ne sais même pas dans quoi, d'ailleurs. Comme si on avait franchi une limite dans une sorte d'intimité – mais indéterminée parce qu'après tout tout est public ; si ça se trouve des gens de ma famille sont tombés sur mon blog, ont deviné que c'est moi, et le lisent avec avidité pour mieux comprendre cette fille secrète de leur entourage. C'est le danger d'un journal extime. C'est moi qui ai fait le choix d'envoyer mon roman avec mon adresse mail perso. Mais ce sentiment de trop, d'insécurité, arrive par vagues, dans les moments où je ne suis pas forcément bien, où je m'arque-boute derrière une identité numérique qui cache autant qu'elle montre, dans le sens où, ce que je dis ici, je ne pourrais sans doute le dire à personne en face à face. À la fois, ne pas savoir par qui on est lu (et même si on est lu) est libérateur ; d'un autre, si on y pense trop, on réalise que donc peut-être des gens qui ne devraient jamais avoir accès à ces informations se trouvent de l'autre côté de l'écran. C'est juste un jeu de perceptions, et j'ai l'impression d'arriver de moins en moins à trier mes perceptions de mes analyses.

Il est arrivé un truc, ce midi. Il y a quelques jours, une maison d'édition a contacté la radio locale où je travaille pour nous proposer de parler d'un livre. Il se trouve que le livre en question n'est pas extraordinaire (c'est un euphémisme) et que je l'ai dit sur le forum d'écriture (ça, et les résultats de ma petite enquête de routine pour juger du sérieux d'une maison d'édition) et que, bien sûr, la dame qui m'avait contactée, l'a vu. Tant pis, c'est le jeu. N'empêche, elle a envoyé son message sur Facebook et c'est mon chef qui est venu me demander qui était cette personne qui nous envoyait des messages à la suite. Elle cite le forum dans le message. Cette partie du forum est publique. Mon blog est relié à mon profil sur le forum. Vous voyez le cheminement de mon esprit, n'est-ce pas ? Dans un élan de lucidité, j'ai supprimé cette conversation (après avoir répondu à la dame, quand même), parce que je n'ai pas du tout envie que mon chef aille farfouiller. Je ne pense pas qu'il en ait le temps, loin de là, mais enfin vaut mieux prévenir que guérir. Je me suis aussi dit que si l'auteur, que je reçois en interview, a été prévenu, ça va pas aller du tout. J'ai tout cassé ma sécurité, et en plus sans y penser. Je m'étais dit, bien sûr, que les gens de la ME verraient peut-être mes messages (ceci dit je ne cite pas ma radio ni rien – j'ai pas de chance si mon média est le seul contacté à avoir répondu positivement) mais je n'étais pas allée plus loin dans ce que ça signifiait. Et maintenant j'ai peur, toute fébrile, de me retrouver à m'adresser à qui ne devrait jamais lire ce blog, ni les futurs articles, ni même – et encore moins ! – les anciens.

C'était arrivé une fois, je crois que je vous l'avais raconté. Je regarde par-dessus l'épaule de ma mère sur son ordi à sa demande, et je vois le dernier mail reçu : "le blog de ta fille" (une bête erreur de compte Blogger relié à feu Google+, faut-il être stupide : si ma cousine avait trouvé mon blog d'alors, j'aurais bien dû me douter que d'autres tomberaient dessus aussi ! pas vive d'esprit, Énir !). Panique à bord. Panique intersidérale : toutes mes peurs, tous mes secrets révélés, et en plus confirmation ignoble que je ne peux pas avoir confiance dans les membres de ma famille : ils l'ont trouvé, et ils vont le lire au lieu de simplement passer leur chemin. Personne n'est digne de confiance en ce bas-monde (je le sais peut-être même depuis que j'ai failli me noyer mais je continue d'espérer, encore et encore, entre désir et peur de faire confiance). Bref. Je me retrouve en insécurité extérieure et intérieure. Mon cerveau mouline tout seul sur ses scenarii et pendant ce temps-là je garde les yeux grands ouverts dans le noir.

C'est d'autant plus con que, ces derniers jours, j'avais trouvé la parade. J'écoute l'ASMRiste Samuse et dans certaines vidéos elle dit : "tu es en sécurité", et moi j'essayais ça, de me répéter ça la nuit avant de dormir. Mais ça ne marche pas, parce que je ne me sens pas en sécurité. Alors j'ai remplacé "sécurité" par "sûreté" dans le sens du CNRTL (oui, je suis allée vérifier ! ;P) : "ce par quoi quelque chose est rendu sûr". En gros : la porte de l'appartement ferme bien, les volets des fenêtres sont clos, personne peut entrer, tout va bien. C'est pas la sécurité mais c'est toujours ça de pris. Isolée, fragile et vulnérable, mais en sûreté comme un petit poussin dans un coffre-fort, m'voyez ? Sauf que du coup, trouver sa voiture pétée volontairement le lundi matin, ça ne fait pas très "sûreté". Même si je ne dors pas dans ma voiture…

J'aimerais bien savoir ce que ça fait, le sentiment de sécurité. Ça se ressent ? Ou on sait qu'on est en sécurité mais on sent rien de particulier, pas comme la peur, le stress ou la joie ? Comment vous décririez le sentiment de sécurité ?

12 commentaires:

  1. Je pense que le sentiment de sécurité, on le ressent surtout quand on sort d'une période où on était en insécurité. Aujourd'hui, par exemple, quand je suis chez moi, je ne ressens pas la sécurité parce que je ne me pose même pas la question: ça tombe sous le sens que je suis en sécurité chez moi.Par contre, quand j'ai vécu quelques semaines avec un de mes ex, même s'il m'a fallu du temps pour l'admettre, je n'étais plus en sécurité chez moi. C'est seulement quand il est parti que je me suis alors dit "je suis en sécurité" et que j'ai apprécié ce sentiment. Bref, pour moi le sentiment de sécurité est dépendant du sentiment d'insécurité. :)

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    1. C'est intéressant comme expérience ! J'ai plus qu'à attendre, alors x)

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  2. Le sentiment de " sécurité"? Euh, je crois bien que je ne sais pas ce que c'est ou plutôt, je ne sais plus ce que c'est depuis très longtemps, je me suis peut-être sentie en sécurité lorsque j'étais enfant, je pensais alors que mon père était un super héros qui avait les solutions à tout. Depuis, c'est la panade, je ne me sens jamais en sécurité.
    pour mon premier blog où je disais pas mal de choses très personnelles, une personne de mon entourage l'a trouvé, tu ne peux pas savoir comment j'ai paniqué, tellement paniqué que je l'ai fermé dans les jours qui suivaient. Elle m'avait trouvé à cause d'un nom de lieu, depuis je ne publie plus jamais de nom de lieu proche de chez moi, je pense ne pas avoir été découverte depuis.Comme toi je panique pour pas mal de choses, les dernières choses furent les fissures sur les murs de ma maison achetée il y 6 ans, c'est horrible, ça me fait peur, ça m'angoisse, je ne sais pas quoi faire, faut-il les réparer, comment ? Souvent ça m'empêche de dormir.

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    1. Oh si, j'imagine parfaitement ta panique ! Quand j'ai vu le mail dans la boîte de ma mère, je me suis éclipsée en vitesse et je l'ai fermé direct !
      J'ai aussi une fissure dans mon salon, plus longue qu'au départ, je crois, et un quadrillage de toutes petites fissures sur un plafond... si je laisse partir mes pensées j'imagine que ça va s'écrouler... On fait la paire, toutes les deux !
      J'imagine que tu as fait des recherches sur Google : internet dit quoi à propos des fissures ?

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    2. Tout et son contraire, moi, les fissures elles sont à l’extérieur et il n'y en a qu'une qui donne aussi à l’intérieur; Elles sont probablement dues à la sécheresse d'il y a deux ans. J'habite un village en zone inondable, on a donc des alternances de sol trempé ou sec.Bien sûr, aucun recours possible avec l'assurance tant que la commune n'est pas déclarée en état de catastrophe naturelle, il faudrait bien plus de gens touchés par la même chose que moi pour le demander. J'ai fait passer un entrepreneur qui s'est moqué de moi, pour lui ce sont des microfissures, il voulait juste comme tout le monde en ce moment réaliser une isolation par l'éxterieur, devis de plus de 20 000 €, même avec les aides du gouvernement j'en avais encore pour plus de 10 000€, j'ai abandonné. J'ai réparé moi-même la plus grosse fissure pour que le froid n'entre pas cet hiver. Et je vais peut-être réparer les autres fissures moi-même au printemps avec la réalisation d'un nouveau crépis, mais il faut que je retrouve mes forces avant de pouvoir faire ça ... Bref, ça me travaille souvent la nuit ces histoires là !
      Et oui, on fait vraiment la paire ! :D

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    3. Si le pro dit que ce sont des micro-fissures, je pense que ça pourrait te rassurer (sinon il aurait sauté sur l'occasion pour te faire réparer la maison et te faire casquer !) mais enfin je dis ça tout en sachant que ça me ferait flipper aussi !

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    4. ah, mais en effet qu'il m'a proposé de casquer , 20 000€ quand même ! ;) Micro fissure, micro fissure, quand cet été en me penchant le long de la fissure intérieure, j'ai soudain vu la lumière extérieure et le vert de la pelouse, je peux te dire que mon sang a fait trois tours ! :lol: C'est celle-là que j'ai réparé toute seule !

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    5. Ah oui, effectivement... ça doit faire un drôle d'effet de voir l'extérieur au travers du mur !

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  3. Bonjour,
    Je me demande si la sécurité ce n'est pas avant tout quelque chose d'intérieur, une sort de paix en soi.
    Mais c'est un peu comme tout, ça varie en fonction des périodes, des personnes, des expériences de vie. Et parfois il y a un peu trop de facteurs qui font pencher la balance.
    C'est clair que de se répéter qu'on est en sécurité quand on ne le sent pas ça ne fonctionne pas. Il faudrait peut-être creuser pour voir comment tu te sentirais si tu étais en sécurité? Qu'est-ce que tu as besoin pour ressentir ça?
    Quelles sont les peurs derrière?

    Ce sont juste des pistes à la lecture de ton article!

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    1. "Juste" des pistes mais des pistes intéressantes !
      Je me demande si le sentiment de sécurité ne va pas aussi avec la confiance en les autres : on sait que tout va bien parce qu'on a des gens sur qui compter (si je laissais dérailler mon cerveau, je me dirais que, dans une maison en feu, si une personne avait le choix entre moi et quelqu'un d'autre, il prendrait l'autre… c'est le genre de truc qui peut me traverser l'esprit).
      Quand j'essaye de m'imaginer en sécurité, je pense que je suis détressée (ce qui rejoint l'idée que c'est à l'intérieur). Ce dont j'ai besoin pour me sentir en sécurité, je ne sais pas... je rêve souvent de me sentir en sécurité dans les bras d'un garçon, mais je ne pense pas que ça serait vraiment sein de ne me sentir en sécurité que comme ça ? Ce serait un truc à explorer avec un psy... je suis toujours sur la liste d'attente de celle que j'ai contacté... je vais peut-être essayer d'en contacter une dans ma ville mais vu le désert médical, j'y crois pas trop...
      Les peurs derrière... l'abandon, je pense. Des fois je me dis que si j'étais dans le coma personne viendrait me voir (ou mes parents parce qu'ils sont obligés, mais dans mes amis personne ne ferait le déplacement), ou que si je mourrais demain les lecteurs de mon blog ne le sauraient pas et penseraient que j'ai juste disparu des radars et je songe souvent donner mes accès à quelqu'un mais j'ai assez confiance en personne pour ça (ou alors en des personnes qui n'auraient aucun moyen de savoir que je suis morte, puisqu'elles ne sont en contact avec personne de mon entourage proche). Y a du boulot…

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  4. Alors j'ai réfléchi à ton ultime question et je ne sais pas trop quoi répondre en fait...
    Perso je pense que ça dépand des gens et de leur vécu...
    Sinon pour l'histoire du blog dévoilé c'est ma hantise aussi... je veux que ça reste mon coin secret, je ne sais pas comment je réagirais si un jour quelqu'un que je connais me dit qu'il me lit. Je pense que je nierais en bloc.Lol

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    1. Ah, c'est intéressant ça, que ça dépende des gens !

      Y a un truc tellement paradoxal à s'afficher au monde entier tout en craignant certaines personnes !...

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